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Leur société
Impôt sur la fortune : C'est vraiment une misère
Le gouvernement et sa majorité sont tombés d'accord sur la réforme de l'ISF, l'impôt de solidarité sur la fortune: son barème sera actualisé et son indexation annuelle suivra celle de l'impôt sur le revenu. Les riches obtiennent donc satisfaction partielle.
Le projet de soustraire à cet impôt tel ou tel élément supplémentaire de la fortune, comme l'ensemble de la résidence principale, sera gardé pour une autre fois. On peut faire confiance à la droite et au gouvernement pour ne pas oublier. Tout comme on peut faire confiance aux privilégiés pour continuer à réclamer la suppression de cet impôt. De toute façon, celui-ci a plus été un thème de propagande qu'une manière de taxer vraiment les grandes fortunes.
La 34e proposition du candidat Mitterrand, en 1981, disait: "Un impôt sur les grandes fortunes, selon un barème progressif, sera institué." En décembre 1981, après bien des polémiques entre gauche et droite, naissait l'IGF, impôt sur les grandes fortunes, qui taxait, un tout petit peu, les biens mobiliers -les biens professionnels et les oeuvres d'art étant exonérés. Son taux allait de 0,5 à 1,5%. Pas de quoi mettre les riches dans la misère.
En 1986, la droite étant devenue majoritaire au Parlement, Chirac supprima cet IGF, qu'il a qualifié d'impôt "inquisitorial et pervers". En 1988, briguant un second mandat, Mitterrand le proposa à nouveau dans sa Lettre à tous les Français: "Je prévois, enfin, le retour dans notre législation de l'impôt sur les grandes fortunes. (...) Il sera bon de ne pas élargir le champ des foyers assujettis à cet impôt et d'intégrer l'inflation dans le calcul de l'abattement à la base. Il frappera donc, comme en 1985, quelque 100000 personnes, les plus riches, son produit servant à financer une large part du revenu minimum d'insertion que recevront les nouveaux pauvres." L'impôt était donc justifié par l'aide aux pauvres, que Mitterrand prévoyait plus nombreux. Mais l'ISF était soigneusement limité aux 100000 "plus riches", en excluant donc à l'avance une bonne part.
Chirac, au même moment, se montrait critique: "Je suis pour faire payer les riches, naturellement, mais l'IGF conduira à un transfert des capitaux vers l'Allemagne." Ce qui était exagéré, mais montrait qu'il n'avait guère confiance dans le sens civique des privilégiés.
L'ISF, ex-IGF, fut donc recréé en 1988. Dès 1989, le socialiste Bérégovoy plafonna le total de l'impôt sur le revenu plus l'ISF à 70% des revenus imposables; plafond qui fut porté à 85% en 1991.
En 1995, la droite occupant cette fois la présidence et le gouvernement, loin de s'attaquer à l'ISF, Juppé limita son plafonnement.
En 1997, la gauche revint au gouvernement. On parla d'élargir l'assiette de l'ISF aux biens professionnels ("l'outil de travail", disons plutôt les capitaux des uns pour exploiter le travail des autres), mais on se limita à réaménager les taux.
Quant à Raffarin, à son arrivée au gouvernement en 2002, il assurait que la réforme de l'ISF n'était pas sa priorité. Il souhaitait sans doute ne pas apparaître trop ouvertement comme l'agent des riches. Mais il se laissa faire une douce violence par sa majorité.
Ainsi, les plus riches de ce pays paieront moins, alors que les RMIstes sont de plus en plus nombreux.