Pas très catholique, leur levée de boucliers contre la Turquie!13/10/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/10/une1889.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Tribune de la minorité

Pas très catholique, leur levée de boucliers contre la Turquie!

Tout le monde politicien français est en émoi, du PS à l'extrême droite, de Fabius à de Villiers, en passant par l'UDF et l'UMP avec Bayrou et Sarkozy. Tremblez devant la Turquie, disent-ils, car ce pays ne respecte pas assez les droits de l'homme. Et les mêmes d'exiger un débat au parlement, voire un référendum sur l'entrée éventuelle de la Turquie en Europe (dont il n'est d'ailleurs même pas question avant 2015 ou 2020!).

Curieux, tout de même, que tous ces prétendus démocrates n'aient exigé ni débat parlementaire, ni référendum, sur l'intervention française au Rwanda et l'aide aux génocidaires là-bas? Ou pour l'envoi des troupes françaises en Afghanistan où elles servent à protéger des seigneurs de la guerre et un régime mille fois pire pour les femmes et les travailleurs que le régime turc actuel?

Au nom de la démocratie? Mais pourquoi ces mêmes hommes politiques ne se sont-ils pas mobilisés de la même façon contre le soutien de Chirac à Poutine dans sa sale guerre à la Tchétchénie? Pourquoi ne se sont-ils pas plus révoltés contre l'appui militaire français au dictateur du Soudan responsable de massacres ou encore les bonnes affaires du trust français Total avec la dictature de Birmanie? Puisqu'ils se demandent si on ne torturerait pas dans les prisons d'Istanbul, demandons-leur seulement si on ne torturerait pas dans les prisons de Côte d'Ivoire ou du Centrafrique sous protection de l'armée française.

Bien sûr que la Turquie est une semi-dictature, mais cela ne les gêne pas contrairement à ce qu'ils prétendent. Le parlement français s'indigne maintenant des défauts de la démocratie turque? Que nos députés aillent donc expliquer à Renault que son entreprise Oyak, dont elle partage la propriété avec la hiérarchie militaire turque, n'aurait pas dû dénoncer les syndicalistes au régime, en les faisant arrêter et peut-être torturer! Allez expliquer aux patrons français, d'Axa, L'Oréal, Bouygues ou France Telecom, qui ont de nombreuses affaires dans ce pays, qu'ils devraient d'abord réclamer une démocratisation ou une "désislamisation" des lois avant d'exploiter les salariés turcs!

La Turquie étant un pays musulman, toute cette agitation hautement médiatisée en revient tout simplement à de la démagogie nationaliste et raciste. De Villiers comme le reste de l'extrême droite ne s'en cache pas. Il affirme que l'Europe doit être chrétienne et se prend pour un seigneur de guerre en armure à l'époque des croisades. Les autres, de droite comme de gauche, Bayrou, Sarkozy ou Fabius, sont simplement plus hypocrites, mais misent sur les mêmes préjugés.

Toute cette démagogie leur convient d'autant mieux que cela permet d'agiter un autre mythe démagogique et xénophobe: celui des délocalisations et de la concurrence des travailleurs des pays pauvres, qui menaceraient les emplois en France. Ce chantage a déjà permis à des patrons d'obtenir des diminutions de salaires par une augmentation d'horaires. Mais, n'en déplaise aux Fabius, Bayrou ou de Villiers, Nestlé ne va pas licencier à Perrier pour délocaliser la source d'eau gazeuse en Turquie ni en Chine! Doux, qui fait le même chantage pour imposer la suppression des RTT, n'ira pas fabriquer ses poulets à Istanbul pour les vendre en France.

Le chômage augmente, mais 5% seulement des suppressions d'emplois sont dues aux délocalisations. Le reste, 95%, est dû à l'avidité des patrons français. Une bonne preuve: ce n'est pas la Turquie mais la France qui vient en deuxième place mondiale pour les investissements étrangers. Et quand les financiers, français ou étrangers, investissent en France, c'est bien parce que les conditions d'exploitation leur sont aussi sinon plus favorables qu'ailleurs.

Pour nous défendre contre tous ces voleurs et ces menteurs, commençons par reconnaître nos amis de nos ennemis. Travailleurs français, ceux qui suppriment nos emplois sont des patrons français et pas des travailleurs turcs! Ne tombons pas dans le panneau qui est mis en place par les représentants politiques de nos licencieurs!

Éditorial des bulletins d'entreprise L'Étincelle de la fraction de Lutte Ouvrière, du lundi 11 octobre 2004

Convergences Révolutionnaires n° 35 (septembre-octobre 2004) - bimestriel publié par la Fraction
Dossier: Défendre les services publics? Pourquoi? Comment?
Articles: Le seul référendum à préparer: dans la lutte, la rue, la grève - La cohésion sociale façon Peugeot-Citroën - Où en sont les intermittents du spectacle? - Belgique, Allemagne: l'offensive anti-ouvrière à l'échelle de l'Europe - Venezuela: après le succès de Chavez au référendum..
Pour se procurer ce numéro, 1,5€, ou s'abonner (1 an: 9€; de soutien: 15€) écrire à: LO, pour la Fraction, BP 233-75865 Paris Cedex 18 ou Les Amis de Convergences, BP 128-75921 Paris Cedex 19 Sur le Net: http://www.convergencesrevolutionnaires.org

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