Médicaments homéopathiques : Quand il suffit de rien pour soigner09/09/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/09/une1884.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Médicaments homéopathiques : Quand il suffit de rien pour soigner

"L'homéopathie est une méthode imaginée il y a deux siècles, à partir d'a priori scientifiques dénués de fondements scientifiques. Elle a vécu jusqu'à maintenant comme une doctrine à l'écart de tout progrès."C'est l'Académie de médecine qui le dit!

Effectivement, c'est à la fin du 18e siècle que Hahnemann, un médecin allemand, désespéré dit-on du peu d'efficacité des thérapeutiques de son époque, inventa les postulats arbitraires de l'homéopathie. Sous prétexte que l'écorce de quinquina aurait provoqué chez lui de fortes suées et des tremblements semblables à ceux du paludisme que l'on traitait alors par ce produit, il émit le premier postulat: "les semblables sont soignés par les semblables". Pas fou, avant d'essayer sur lui-même d'autres produits plus dangereux, Hahnemann eût l'idée de les... diluer. Ainsi naquit le deuxième postulat, "le principe de dilution".

Dans un premier temps, une goutte du produit est diluée dans cent fois son volume d'eau. Puis, à son tour, une goutte de ce mélange est diluée dans cent fois son volume, etc. Jusqu'à 7, 8, 9 fois successives, et même plus. C'est cela le fameux "CH" inscrit en gros sur les petits tubes de granules homéopathiques, qui signifie dilution Centésimale Hahnemannienne. Inutile de dire que quand on parvient ne serait-ce qu'à la septième dilution, il n'y a plus trace du produit d'origine. C'est de l'eau. Et l'eau, c'est sûr, cela ne fait pas de mal.

En son temps, l'homéopathie eut du succès. Il faut dire que, comparée aux purges et aux saignées à tout-va que pratiquaient alors les médecins, c'était une thérapeutique infiniment moins dangereuse. Mais aujourd'hui...

Dans l'arsenal administratif et juridique qui réglemente la mise sur le marché des médicaments, les médicaments homéopathiques jouissent d'un statut tout à fait à part. Ils n'ont pas besoin de faire la preuve de leur efficacité thérapeutique par des essais sur des groupes de malades. Et pour cause, ces essais se déroulent "contre placebo", c'est à-dire contre une substance qui a l'allure d'un médicament mais qui ne contient aucun principe actif et qui n'est donc pas un médicament. Un groupe de patients reçoit le placebo, un autre reçoit le médicament proposé et on compare les effets. Comme les granules homéopathiques sont eux-mêmes des placebos, leur efficacité comparée à celle d'un placebo est bien évidemment identique: elle n'est pas nulle. Parce que l'organisme parvient à lutter, avec ses propres défenses contre un certain nombre de troubles. Et c'est heureux, car comme les médicaments réellement efficaces ne datent, en gros, que d'un peu plus d'un siècle, si les défenses naturelles n'étaient pas suffisantes, nous ne serions pas là pour discuter de l'homéopathie...

En fait, les médicaments homéopathiques ne sont remboursés, à 70% à l'époque, que depuis vingt ans, depuis 1984 quand Georgina Dufoix était ministre de la Santé socialiste et -dit-on- plutôt sensible aux médecines dites "parallèles ou douces". En 1999, quand les médicaments ont été passés au crible, pour évaluer leur "service médical rendu", les produits homéopathiques sont passés à travers. Tout juste a-t-on baissé leur taux de remboursement de 65 à 35% en mars 2004, avec toute une série d'autres médicaments au service médical rendu "insuffisant". Mais pas "nul". Les déclarés "nuls", eux, ont été déremboursés.

C'est sûr, les médicaments homéopathiques sont sans danger, ils ne risquent pas d'entraîner des effets secondaires gênants, puisqu'ils ne contiennent rien. C'est vrai, ils peuvent être efficaces pour les petits maux qui guérissent tout seuls. Et c'est ainsi qu'ils sont le plus souvent prescrits. Mais les charlatans qui se font fort de traiter des maladies graves, des cancers par exemple, par l'homéopathie sont de véritables criminels.

On nous dit que si les médicaments homéopathiques connaissent un certain succès, c'est parce qu'ils rassurent, qu'ils permettent aux adeptes du "naturel" de se soigner, qu'ils sont la contrepartie de l'excès de prescriptions de médicaments entraîné par les lobbys des industriels du médicament. Mais c'est aussi à cause d'un manque de culture et de formation et, probablement, des bons contacts que les patrons des laboratoires qui les commercialisent ont à la cour des décideurs.

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