Les propos tenus par Ariel Sharon, le Premier ministre israélien, appelant les Juifs de France à émigrer immédiatement en Israël pour fuir "un antisémitisme des plus sauvage" a suscité un tollé bien mérité.

Mais les commentaires critiques qui ont accompagné les déclarations de Sharon n'ont pas tous insisté, loin de là, sur l'aspect de plus choquant de la diatribe sharonienne, celle concernant la population arabe. Que Sharon pense que les Juifs de France devraient plutôt vivre en Israël, c'est là une idée propre à tous les responsables sionistes. Mais que le départ vers Israël soit nécessaire à cause du fait que la population française compte "10% de musulmans", comme l'a affirmé Sharon, est une insulte qui en dit long non seulement sur le racisme du personnage mais sur la façon dont sont considérés, et donc traités, les musulmans et les Arabes en Israël et en Palestine occupée.

En fait, les propos de Sharon, plus qu'aux Juifs de France, sont destinés à l'opinion intérieure israélienne. Vis-à-vis des Israéliens, c'est une façon de dire que l'opposition qui existe entre les populations juive et arabe (dont la politique menée par l'État israélien est la principale responsable) n'est pas un fait proche-oriental, mais un fait bien plus général puisqu'en France aussi... Et c'est en cela, vis-à-vis des Israéliens cette fois, que les propos de Sharon sont orduriers, car il les enferme dans un isolement sans issue.

La carrière de Sharon, général et politicien impérialiste, est faite de ces provocations qui visent à creuser toujours plus le fossé qui sépare Arabes et Israéliens. Et cette fois encore il tente d'accentuer dans la population juive israélienne la mentalité d'assiégé, pour la souder derrière une politique qui depuis plus d'un demi-siècle enferme les peuples de la région dans des affrontements sanglants.

Quand Sharon se pose en représentant et défenseur des Juifs, c'est plutôt en représentant et défenseur d'une politique réactionnaire pro-impérialiste qu'il agit. Et c'est d'abord l'intérêt des Israéliens eux-mêmes de rompre avec cette politique qui, sous prétexte de les sauver de l'oppression antisémite, fait d'eux-mêmes des gardiens de camps de concentration et les oppresseurs haïs du peuple palestinien et des peuples arabes en général.