EDF-GDF : Grèves reconductibles et coupures25/06/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/06/une1873.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

EDF-GDF : Grèves reconductibles et coupures

Après la journée nationale d'action du 15 juin, un certain nombre de centres EDF-GDF ont décidé des grèves reconductibles et des coupures ciblées. Il est assez difficile d'avoir un tableau exact de la situation, très variable d'un endroit à un autre, à cause d'une information qui passe assez mal au niveau syndical.

Il semble cependant que le mouvement, très minoritaire pour le moment, se soit durci le 22 juin.

Dans au moins une douzaine de centrales nucléaires (sur 19 dans le pays) des grèves reconductibles ont été votées, de durée variable: 8 heures par jour à Chinon, 24 heures à Saint-Laurent-des-Eaux, 4 heures à Paluel. À Tricastin une assemblée générale a rassemblé 700 personnes. Le taux de grévistes était parfois très important: 60% au Bugey, 48% à 55% selon la direction à Saint-Laurent-des-Eaux. Des piquets de grève ont bloqué au moins quatre centrales. Des baisses de charges ont été provoquées dans quatre centrales.

Par ailleurs quinze postes à très haute tension (400000 volts, 225000 et 90000 volts) étaient occupés mardi 22 juin.

Tout cela a dû obliger EDF à arrêter les exportations de courant prévues vers la Grande-Bretagne, les pays frontaliers de l'Est et l'Espagne et, au contraire, EDF a dû importer de l'électricité.

Mais c'est loin d'être tout. Des centrales hydroélectriques dans les Alpes et les Pyrénées, l'usine marémotrice de la Rance, des centrales thermiques ont connu des grèves, coupures, baisses de charges. Des centres Recherches et Développement, à Clamart et Chatou, dans la région parisienne, sont en grève reconductible.

La distribution paraît moins touchée, mais on note des grèves reconductibles et des actions diverses dans plusieurs départements (Côte-d'Or, Charente-Maritime, Vendée, Calvados, Loire-Atlantique...) ou dans des villes (Lyon, Agen, Villejuif...).

Et puis le secteur gazier est lui aussi touché. Le terminal méthanier de Montoir-de-Bretagne a été bloqué, puis débloqué pour raison de sécurité, et à nouveau bloqué le 21 juin. Le stockage gazier de Fos-sur-Mer est occupé. Des navires n'ont pu être déchargés.

Mais, d'un centre à l'autre, l'information circule bien mal. Ainsi sur le centre Franche-Comté Sud (Besançon) le lendemain de la journée d'action du 15 juin, le personnel a voté la continuation de la grève à 70%, ce qui a entraîné coupures et manifestation avec les voitures bleues. Mais strictement personne n'en a parlé, et surtout pas les fédérations syndicales. Et du coup, constatant que sur le plan national ça ne suivait pas, le mouvement de grève a cessé le lundi 21.

L'attitude des fédérations syndicales, en premier lieu celle qui compte le plus, la CGT, est calamiteuse. Officiellement l'interfédérale appelle à une "nouvelle journée d'action des électriciens et gaziers le 24 juin avec arrêt de travail, ainsi que

  • remise de l'énergie aux démunis;
  • baisses de production coordonnées;
  • intervention sur l'outil de travail;
  • campagne de pétitions; manifestations locales ou régionales;
  • et elle préconise des "coupures ciblées". Mais les fédérations ignorent délibérément le mot de grève.

    À ce sujet voici ce que déclarait le 15 juin, après la précédente journée d'action, le secrétaire général de la Fédération des mines et de l'énergie CGT, Imbrecht: "Pour en revenir à la question de la grève générale (...) pourquoi faudrait-il que les salariés s'engagent aujourd'hui dans des actions coûteuses d'un point de vue salarial alors que la semaine passée a montré que leur détermination pouvait s'exprimer au travers de modalités d'actions beaucoup plus pénalisantes pour les employeurs, beaucoup plus visibles et intéressantes en terme de popularisation et beaucoup plus adaptées au combat engagé, notamment dans la durée". C'est clair: c'est non.

    Bien sûr, chacun sait que la grève ne se décrète pas par un coup de baguette magique. En revanche cela peut se préparer. Il y a à EDF-GDF, dans tout le pays, des minorités décidées à l'action, qui pourraient peut-être s'élargir et entraîner l'ensemble du personnel dans la lutte. Ce n'est certainement pas gagné d'avance. Mais en faisant d'abord connaître leurs mouvements à l'ensemble du personnel, en les coordonnant, en favorisant le fait que les grévistes aillent s'expliquer auprès des autres travailleurs d'EDF-GDF, il serait sans doute possible d'étendre et de développer le mouvement.

    Si les électriciens et gaziers veulent réellement empêcher la modification du statut de leur entreprise, empêcher la privatisation avec toutes les conséquences désastreuses pour eux et pour les usagers, quel autre choix y a-t-il que la grève? Et cette grève pourrait s'appuyer sur la sympathie de l'opinion populaire, car la privatisation d'EDF et GDF n'a pas précisément bonne presse.

    C'est apparemment ce que les directions syndicales ne se soucient pas de préparer. Alors, comme d'habitude, elles gèrent le mécontentement, elles amusent la galerie, laissent s'effilocher les actions sans chercher à préparer un rapport de forces digne de ce nom.

    Heureusement le personnel a de la ressource, on le voit bien, et la partie n'est pas jouée.

    Partager