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- Lutte ouvrière n°1861
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Renault-Flins - Leur production au mépris de notre vie : Un travailleur meurt écrasé aux Presses
Lundi 29 mars, à Renault Flins, un travailleur de l'équipe du matin a trouvé la mort dans le secteur des presses. Il a été écrasé entre deux outils de plusieurs tonnes alors qu'il les manipulait avec le pont roulant.
L'atelier des presses est par définition un atelier dangereux: on y manipule des charges énormes; le bruit y est incessant. Mais depuis des années la politique de productivité à tout prix que pratique la direction a considérablement accru les risques d'accidents. On alimente en pièces non seulement l'usine de Flins mais aussi beaucoup d'autres et les chefs font pression en répétant qu'on va arrêter toutes les usines du groupe si on ne va pas assez vite; il faut produire en "juste à temps": on change donc souvent de gammes de fabrication ce qui multiplie la manipulation des outils et donc les risques.
Les machines tournent 24 heures sur 24 et l'entretien préventif n'est pas fait; on répare à toute allure ce qui tombe en panne. L'huile dégouline de partout et les caristes qui transportent les conteneurs de pièces ont beaucoup de mal à ne pas déraper. Un bon nombre de systèmes de sécurité sont hors service: sur plusieurs presses, les portes de capotage ne fonctionnent plus, remplacées par un petit grillage.
La situation s'est aggravée depuis plusieurs mois quand la direction a décidé de rénover des lignes dans une partie de l'atelier tandis que l'autre continue à produire. L'encombrement est devenu insupportable: tous les outils -300 à 400 en tout sur dix lignes de presses, six lignes de découpe et systèmes de soudure au laser ("rabouteuses")- sont stockés dans des espaces réduits, prêts à s'écrouler. C'est ce qui s'est passé quelques jours avant l'accident mortel: quatre outils de plusieurs tonnes chacun se sont effondrés, manquant de peu des ouvriers qui travaillaient tout à côté.
Les accidents sont fréquents: coupures plus ou moins graves, malgré plusieurs paires de gants, doigts meurtris ou écrasés et la direction multiplie les pressions et les obstacles quand on veut obtenir les volets d'accident du travail. Il y a déjà eu, ces dernières années, des accidents très graves. Deux ouvriers sont tombés dans les trappes d'évacuation des chutes de tôle: 18 à 25 mois d'arrêt de travail. Un travailleur a eu le bras arraché sur une presse de découpe, un autre la main broyée et plus récemment, un troisième a eu une fracture du crâne. Ils sont maintenant handicapés à vie.
Dans sa volonté de restreindre le personnel, la direction pousse à la "polyvalence": un certain nombre de travailleurs sont amenés à tenir plusieurs postes, dont celui de pontonnier, qui est particulièrement difficile. C'était le cas pour le camarade qui est décédé: il avait, dans la même journée, tenu plusieurs postes avant de venir manipuler le pont. Et ce pont présentait plusieurs anomalies signalées tous les jours depuis des mois. Le vendredi précédent, à 6 heures, notre camarade, qui allait mourir le lundi, en avait signalé une.
La politique de la direction est directement responsable de la mort de ce jeune travailleur de 30 ans. Après l'accident, l'émotion et l'abattement ont été terribles et l'atelier n'a plus travaillé; le lendemain, mardi, l'équipe du matin n'a pas repris; celle d'après-midi n'a commencé à travailler qu'à 16 heures malgré les pressions des chefs.
Après avoir refait la liste de toutes les infractions à la sécurité, il va falloir contraindre la direction à effectuer les réparations nécessaires. Il y en a assez de ces accidents, assez de voir des camarades mourir ou être mutilés à l'atelier, assez de ce mépris criminel pour la vie des travailleurs.