Italie : La procréation médicalement assistée, sous le voile du Vatican08/01/20042004Journal/medias/journalnumero/images/2004/01/une1849.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Italie : La procréation médicalement assistée, sous le voile du Vatican

Le Sénat italien vient d'approuver une loi sur la procréation médicalement assistée particulièrement réactionnaire. Selon cette loi, désormais, seuls les couples "stables" pourront avoir recours à la fécondation in vitro (FIV). Non pas que la loi leur impose de passer nécessairement devant le maire et le curé (quoique... puisque les couples non mariés devront apporter la preuve de leur stabilité!), mais elle rend obligatoire que les ovocytes et les spermatozoïdes utilisés pour une telle fécondation proviennent du couple stérile lui-même.

Donc, plus moyen pour une femme ou un homme dont les cellules reproductrices sont totalement défaillantes d'avoir recours à un don d'ovocytes ou de spermatozoïdes auprès d'une tierce personne, plus le droit pour eux d'avoir un enfant, alors que les progrès de la médecine les y autorisent. Et gare aux médecins qui enfreindraient la loi: ils encourent une suspension d'activité et une amende de 300000 à 600000 euros. Pourquoi? Parce que, comme le déclarent les calotins qui applaudissent à la loi, "seule la fécondation homologue (au sein du couple) peut garantir aux enfants le droit de savoir qui leur a donné la vie"!

La loi prévoit aussi que, lors d'une FIV, il n'y ait pas plus de trois embryons produits, qu'ils soient tous implantés et qu'ils ne soient en aucun cas congelés pour une tentative ultérieure. Cette mesure est carrément criminelle. En effet, lorsqu'une femme décide de recourir à la FIV, elle doit d'abord subir un traitement hormonal lourd et dangereux pour la santé, afin de produire plusieurs ovocytes. Ceux-ci sont ensuite fécondés "in vitro". Puis, si la fécondation a eu lieu, les embryons qui en résultent un amas de cellules mesurant moins d'un dixième de millimètre sont implantés dans l'utérus de la femme. Comme plusieurs embryons peuvent être produits et qu'on n'en implante généralement pas plus de trois afin d'éviter les grossesses multiples, dangereuses pour la mère et pour l'enfant, on peut congeler les embryons surnuméraires, afin de pouvoir procéder, en cas d'échec, à une nouvelle implantation sans que la femme ait à refaire tout le parcours du combattant. Le pape et ses émissaires ont dit non et, donc, peu importent les souffrances des femmes qui devront à nouveau subir une stimulation hormonale suivie d'une ponction ovarienne. Tout cela au nom de l'idée d'un autre âge selon laquelle "la vie commence dès la conception", sans doute par introduction de l'âme dans l'enveloppe charnelle d'un ovule fécondé. Ils finiront bien par trouver une âme y compris dans les spermatozoïdes et alors, attention à l'interdiction de la masturbation!

Autre victoire des curés: l'interdiction du diagnostic pré-implantatoire. La loi interdit de mettre en oeuvre les techniques actuelles qui permettent de savoir, lorsque le père ou la mère sont atteints d'une maladie génétique transmissible, si l'embryon est lui aussi porteur de cette maladie, au prétexte que, "en aucun cas, l'embryon ne peut être soumis à des manipulations génétiques"... Et donc, bien sûr, toute recherche sur les "embryons" que sont ces amas de cellules, issus des toutes premières divisions de l'ovule fécondé, est interdite.

En France, des débats du même ordre viennent d'agiter l'Assemblée nationale, à l'occasion du vote en deuxième lecture des lois de bioéthique. Le don d'ovocytes et de spermatozoïdes n'a pas été remis en cause mais... les couples doivent apporter la preuve de deux ans de vie commune s'ils veulent bénéficier d'une FIV. Les embryons peuvent être congelés en vue d'une implantation ultérieure mais... si les recherches sur de tels embryons étaient initialement autorisées dans un cadre très restrictif, elles sont désormais interdites sauf dérogation... À croire que les parlementaires d'ici sont un peu plus hypocrites, ou simplement un tout petit peu moins proches de Rome.

"L'Italie se place à l'avant-garde en Europe dans la défense de l'embryon", a déclaré, à propos de la nouvelle loi, un responsable de Forza Italia, le parti de droite de Berlusconi. C'est aussi au nom de la défense de l'embryon, de ses "droits" et du respect qui lui serait dû, que se mobilisent aujourd'hui les adversaires de l'IVG, qui n'ont pas supporté sa dépénalisation en Italie et sa légalisation en France. De loi réactionnaire en loi réactionnaire, la liberté se réduit peu à peu sous la pression directe du Vatican. Rien n'est jamais acquis et, partout, il faudra continuer à se battre pour maintenir ce que les femmes ont gagné par leur lutte.

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