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Dans les entreprises
GIAT Industries - Saint-Chamond (Loire) : Un camouflet pour la direction
Lundi soir l5 décembre, les travailleurs de GIAT Industries de Saint-Chamond (Loire) infligeaient un camouflet clair et net à leur direction, empêchant le départ d'une grosse tourelle de marine que la direction voulait effectuer en profitant du fait que des travailleurs, au même moment, étaient mobilisés au Conseil municipal de la ville.
La soirée avait commencé par un rassemblement d'une centaine de travailleurs de cette entreprise d'État, qui sont sous la menace de la fermeture pure et simple de leur site à la fin 2004. Cette fermeture n'est qu'un aspect du plan de suppressions d'emplois (près de 4000 sur un effectif de 6 250 pour tout le pays), plan concocté par la direction du GIAT avec bien sûr l'aval du gouvernement.
Après s'être rassemblés devant la mairie, les travailleurs prenaient place dans la salle du Conseil. Les salariés de GIAT Industries avaient déjà, et à plusieurs reprises, interpellé la municipalité, dirigée par M. Ducarre, UMP, vice-président du Conseil régional Rhône-Alpes et président de l'Association des maires de la Loire. A chaque fois, que ce soit en séance ou devant la mairie, ce monsieur et ses adjoints juraient solidarité aux travailleurs. Mais ensuite rien de concret ne venait: lui et son collègue député continuaient à soutenir sans faille ce gouvernement de licencieurs.
Aussi ne fut-il pas étonnant de voir les représentants de la CGT, le syndicat le plus présent dans l'entreprise, hausser le ton lorsqu'ils s'adressèrent à la majorité municipale ce soir-là. Et la goutte d'eau qui fit déborder le vase fut l'annonce de cette tentative de la direction de profiter de la situation pour faire partir une tourelle de marine terminée. Les travailleurs maintenaient sous surveillance cette tourelle, ainsi que d'autres produits finis, pour bien montrer leur détermination à ne pas se laisser déshabiller sans réagir.
Un représentant de la CGT, s'adressant au maire et à sa majorité, les somma de réagir : "Je propose que vous nous accompagniez à l'usine, ce qui démontrerait votre volonté réelle de faire quelque chose". En l'absence de réaction du côté de la droite, les conseillers de Lutte Ouvrière et du Parti Communiste prirent l'initiative de se lever, le premier déclarant "impossible de siéger alors que les patrons déménagent le site".
Les autres élus de la gauche plurielle suivirent, ainsi que les participants dans le public gagnés par cette cause. La majorité de droite, elle, continua à siéger.
Les travailleurs et les conseillers solidaires, en cortège de voitures, rejoignirent l'usine, y entrèrent tous en choeur et allèrent devant le bâtiment où, effectivement, un camion avec remorque porte-engins était engagé, la tourelle reposant sur cette remorque. Les manoeuvres furent interrompues sans problème. Un responsable du GIAT présent appela le directeur du site. Celui-ci arrivait peu après et était aussitôt entouré par les travailleurs en colère. Il tenta d'expliquer que, non, l'opération n'avait pas été improvisée suite à l'appel des syndicats à se rendre au Conseil municipal, que d'ailleurs la tourelle n'appartenait plus au GIAT, mais à l'acheteur, Talès. Un travailleur l'interpella en faisant remarquer que Talès avait aussi acheté les travailleurs: en effet, il est prévu de placer un atelier hors du périmètre GIAT. D'autres réflexions fusèrent: "Mais elle est à nous cette tourelle". Ou bien: "Ce n'est plus le GIAT, mais les Déménageurs Réunis". Un militant syndical apostropha le responsable avec vigueur: "Vous mettez en balance la livraison d'une tourelle, alors que de l'autre côté de la balance, il y a 700 emplois en jeu; mais qui êtes-vous?".
Plusieurs des présents disaient haut et fort leur dégoût de ces basses manoeuvres, leur volonté de continuer à travailler sur ce site. La presse locale, qui est présente à chaque Conseil municipal, était là en nombre et ne se priva pas de prendre des photos, ce qui lui est interdit en temps ordinaire. L'une d'elles devait paraître dans le quotidien du lendemain.
Sur ces entrefaites, on vit arriver quelques adjoints de M.Ducarre, puis le maire lui-même, entouré de tous ses conseillers. Mais c'était un non-événement: à part quelques quolibets qui lui furent adressés pour sa vitesse de réaction, les travailleurs préféraient parler directement au directeur. Celui-ci, après avoir téléphoné à ses supérieurs, annonça qu'il suspendait l'opération et recevrait les représentants du personnel le lendemain matin.
Le responsable syndical CGT proposa de lever le siège, indiquant qu'il était difficile à la direction de revenir sur son engagement, vu la présence d'élus et de la presse, et affirma qu'il était déterminé à poser avec force la question du maintien du centre de Saint-Chamond en activité.
Tout le monde s'en alla. Et le Conseil municipal put reprendre...