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Grande-Bretagne : Après la manifestation de Londres, Blair sauvé par les attentats d'Istanbul
Pour une manifestation prévue un jour de semaine, celle organisée contre la venue de Bush à Londres, le jeudi 20 novembre, aura eu un succès notable, avec 100000 participants selon la police et plus du double selon les organisateurs.
Contrairement à l'image qu'en ont donnée les médias, le point fort de cette manifestation n'aura pas été le déboulonnage symbolique d'une statue de Bush érigée au milieu de Trafalgar Square. L'aspect le plus marquant en aura été, bien plutôt, l'irruption à partir de cinq heures, c'est-à-dire trois heures après que le cortège eut commencé à s'ébranler, de contingents importants de salariés venus directement de leur lieu de travail pour rejoindre les rangs des manifestants. C'est leur nombre qui a vraiment donné sa taille imposante au cortège, tandis que la présence d'un nombre significatif de postiers, de salariés des transports, du bâtiment, etc., venus en vêtements de travail, était bien plus visible que dans les précédentes manifestations sur l'Irak, largement dominées par un milieu petit-bourgeois.
Cela étant, tout comme ces manifestations passées, celle-ci n'a pas été marquée par une colère à la mesure de l'ignominie qui s'est commise et continue à se commettre en Irak. Et les quelque 5000 policiers mobilisés pour la circonstance ont pu défiler comme à l'habitude de part et d'autre du cortège sans être visés par la moindre invective ni avoir à faire face au moindre débordement aux abords de Downing Street, où se trouve la résidence officielle de Blair.
Mais il faut dire que les organisateurs de cette manifestation avaient pris bien soin d'en faire une protestation contre la venue de Bush et non contre la politique de Blair. Et quoi qu'aient pu en penser les manifestants eux-mêmes, les slogans et placards "officiels", c'est-à-dire ceux qui n'étaient pas le résultat de l'initiative spontanée des participants, se gardaient bien d'écorner le gouvernement travailliste.
Comme on pouvait s'y attendre, le caractère exclusivement anti-Bush de cette manifestation a permis à Blair de prétendre ne pas se sentir concerné. D'autant moins que, le jour même, les attentats commis en Turquie contre un consulat britannique et une banque anglaise lui ont offert l'occasion idéale de relancer sa croisade contre le terrorisme en proclamant la "patrie en danger". Il s'agit là d'une affirmation d'autant plus dérisoire que, malgré d'innombrables avertissements allant dans le même sens, deux exercices préventifs contre le risque d'une attaque au gaz sarin dans le métro, et d'autres gestes sécuritaires du même genre, le gouvernement Blair n'a jamais pu mettre en évidence la moindre preuve que quiconque ait jamais envisagé un attentat en Grande-Bretagne depuis celui du 11 septembre 2001. Ce qui ne l'empêche d'ailleurs pas de maintenir au secret une dizaine de "suspects" depuis des mois au nom de la législation antiterroriste adoptée en 2001.
En revanche les preuves du terrorisme d'État de l'impérialisme britannique et de son armée ne manquent pas, elles. Et pas seulement dans la région de Bassora qu'occupent aujourd'hui les troupes britanniques. On peut noter, par exemple, le fait que la banque anglaise visée par l'attentat d'Istanbul porte le nom bien peu britannique de "Hong-Kong and Shangaï Banking Corporation" (HSBC), une banque dont l'immense empire financier (c'est la première banque britannique et la troisième d'Europe) trouve son origine dans le trafic de l'opium imposé à la Chine par la force des canons au 19e siècle!
Cela ne justifie sans doute pas des attentats aveugles dont les victimes n'ont jamais eu leur mot à dire dans la politique de Blair. Mais cela en dit long sur l'hypocrisie de ceux qui, comme Blair, prétendent débarrasser le monde du terrorisme tout en défendant les intérêts de la bourgeoisie impérialiste en usant de son arme traditionnelle -le terrorisme d'État, contre les populations pauvres.