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Leur société
Débitants de tabac : Le gouvernement met le filtre
Face à la grogne des marchands de tabac depuis l'annonce de la hausse du prix des cigarettes, le gouvernement n'a pas mégoté. A la différence de l'attitude qu'il adopte lorsqu'il a à faire à la protestation des salariés, cette fois il a multiplié les gestes de conciliation. Pendant une semaine, il a reçu tous les jours leurs représentants.
Si le gouvernement a maintenu, pour l'instant, la hausse de 20% prévue en janvier 2004, il a annoncé qu'il allait geler toute hausse future de la fiscalité sur le tabac pendant quatre ans. Il avait déjà annoncé que l'État compenserait 50% à 80% de la baisse de chiffre d'affaires des buralistes due aux hausses du prix du tabac. Dutreil, le secrétaire d'État au commerce, a ajouté: «Le volet entreprise devra garantir à l'ensemble des buralistes, notamment dans les départements frontaliers, le maintien intégral de leurs revenus liés à la vente de tabac, et cela quel que soit le prix de vente fixé par les fabricants de cigarettes». Cette aide, plafonnée dans un premier temps à 10000 euros par débitant, sera illimitée et coûtera bien plus que les 150 millions d'euros initialement prévus, que devait rapporter à l'État l'augmentation des taxes. Enfin, face aux cambriolages qui se multiplieraient dans les bureaux de tabac, Sarkozy a promis un plan de sécurité anti-braquage.
Malgré ces gestes, les représentants des buralistes maintiennent la pression. «Nous sommes des vecteurs d'opinion et nous pèserons de tout notre poids dans les échéances électorales» a menacé un de leurs représentants ajoutant que «quotidiennement, 11 millions de clients viennent chez nous».
Les reculs du gouvernement relèvent, à l'évidence, d'un calcul bassement électoral. Hormis les plus riches, la majorité de la population subit les effets de sa politique et en premier lieu les catégories les plus populaires, travailleurs et chômeurs. Mais, dans son empressement à faire payer la majorité de la population pour pouvoir réserver ses faveurs au grand patronat, le gouvernement prend le risque de mécontenter une partie de son propre électorat. Or celui-ci est courtisé par l'extrême droite, et le Front National s'est empressé d'adresser un courrier à une partie des buralistes. Un démagogue d'extrême droite comme Le Pen sait faire feu de tout bois.
Aujourd'hui le gouvernement fait donc en partie machine arrière face à la réaction des 34000 buralistes. Ceux-ci font reculer ce gouvernement, qui ne sait se montrer ferme que lorsqu'il s'agit de s'en prendre à des millions de futurs retraités.
Dans tout cela, l'argumentaire qui désignait -à juste titre- le tabagisme comme un responsable des maladies et de la mortalité s'envole en fumée. Cela n'empêchera pas ce gouvernement, d'un côté d'empocher les taxes qu'il maintiendra sur le tabac et, de l'autre, de faire retomber le coût de l'augmentation des dépenses de santé sur les assurés sociaux.