Mattei et les ministres sont prêts à accuser n'importe qui d'avoir une responsabilité dans les 15000 victimes de la canicule en août dernier. Pourvu que cela ne les mette pas en cause, et surtout pas la politique d'économies sur la santé et les services publics qu'ils ont en commun avec leurs prédécesseurs de gauche et de droite.

C'est ainsi qu'après les familles, les 35 heures, divers organismes d'alerte ou de veille sanitaire, les Urgences hospitalières puis les médecins libéraux, on incrimine maintenant la dégradation de la qualité de l'air. La pollution est à coup sûr un accusé qui se défendra moins vigoureusement que la corporation médicale.

Le battage médiatique sur le thème "2003, une année historique pour les pics de pollution" n'est nullement anodin. Et c'est ainsi que des journalistes du Monde écrivent: "Après la catastrophe sanitaire due à la canicule des quinze premiers jours d'août, la question est posée de la part respective qui revient à la chaleur et à la pollution pour expliquer la forte surmortalité enregistrée à cette occasion".

Mais ni la chaleur ni la pollution ne tuent automatiquement leurs victimes: il y a des protections, des remèdes. Et l'absence de mise en oeuvre de ces moyens, qui auraient pu sauver des milliers de vies, est bien de la responsabilité des pouvoirs publics. Sans oublier que la pollution elle-même est directement liée à tout un mode d'organisation sociale, de fonctionnement économique et à des politiques qui font passer le profit avant tout le reste, y compris la santé.

Le gouvernement a le culot de présenter comme une mesure de lutte contre la pollution, et donc contre les risques de future catastrophe médicale ou sanitaire, l'augmentation de 3 centimes du litre de gazole qu'il vient de décider. Ponctionner quelques milliards supplémentaires de taxes sur les consommateurs, et essayer de leur faire croire que c'est pour leur bien, il faut oser!

Le gouvernement nous prend pour des imbéciles, à défaut de nous le dire en face. Car quels que soient ses efforts pour esquiver ses responsabilités dans les morts de la canicule, ce qu'il y a de plus clair dans ce drame, c'est toujours le manque de moyens et de personnel médical et social.

Ces économies, faites depuis des années par tous les gouvernements, se sont révélées meurtrières en août dernier. Elles tueront à nouveau à la première occasion. On accusera alors le froid, ou le réchauffement climatique, l'humidité ou la sécheresse ou n'importe quoi d'autre, voire les victimes elles-mêmes ou leurs proches.