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Editorial
La fraîcheur des sommets et celle de l'accueil
Raffarin qui passait ses vacances loin de la canicule, en Haute-Savoie à 1000 mètres d'altitude à Combloux, station proche de Megève, avait confié à la presse que, lors de ses randonnées pédestres, il rencontrait beaucoup de marques d'encouragement de la part des randonneurs qu'il croisait. "Continuez", "Tenez bon" lui disait-on selon lui. Etaient-ce des encouragements pour sa politique dure envers les pauvres, ou tout simplement à propos de la difficulté de la randonnée, on ne sait.
Toujours est-il qu'il a dû être surpris au Stade de France, le samedi23, lorsque, prenant la parole pour ouvrir le championnat du monde d'athlétisme, il fut accueilli par un concert de sifflets venant des tribunes. Cette réaction du peuple vacancier d'en bas envers un ministre vacancier des hauteurs, fut entendue en direct des auditeurs de certaines radios et des téléspectateurs de France 2 et de France 3, bien que cela n'ait pas fait la "une" des quotidiens.
Raffarin peut maintenant mesurer ce que vaut l'opinion de ses voisins de villégiature à l'aune de celle du public populaire du Stade de France. Il a fait voter une loi prévoyant des sanctions contre ceux qui siffleraient la Marseillaise. Il ne lui reste plus qu'à en faire une contre ceux qui refuseraient de chanter les louanges du chef du gouvernement.
Pourtant, il ne fait que récolter ce qu'il a semé depuis seize mois qu'il est au pouvoir par la grâce de Chirac.
Mais si les médias peuvent ne pas insister sur de telles manifestations de mécontentement de la population, ils ne les feront pas disparaître.
Tout est révoltant. L'hypocrisie du tandem Chirac-Raffarin, dont l'un élargit la "fracture sociale", tandis que l'autre écrase la "France d'en-bas" dont ils parlaient avant les élections.
La surmortalité de cet été a révélé à quel point, faute de moyens, la situation des hôpitaux est catastrophique.
Les incendies de forêts ont mis en évidence le sous-équipement du pays en bombardiers d'eau et en personnel.
La multiplication des plans de licenciements aidant, le chômage ne cesse d'augmenter. Et si la justice a mis en examen le directeur de l'usine Flodor de Péronne, qui a tenté de faire déménager les machines pendant que les travailleurs étaient en congé, c'est seulement, selon les termes du procureur de la République, pour ne pas avoir "respecté les formes". Chaque nouvelle augmentation du nombre de chômeurs devient pour Raffarin et Chirac un prétexte de plus pour accorder de nouvelles aides à fonds perdus "aux entreprises", c'est-à-dire aux actionnaires.
Le gouvernement prépare une "réforme" de la Sécurité sociale dont tout le monde sait qu'elle aboutira à une nouvelle détérioration du système de protection médicale.
Il n'y a pas assez d'infirmières, pas assez d'enseignants, pas assez de logements sociaux, moins de crédits pour la recherche scientifique, parce que, d'après les gens qui nous gouvernent, il faudrait faire des économies. Mais, selon Chirac, le gouvernement continuera à baisser l'impôt sur le revenu, ce qui ne concerne vraiment que les plus fortunés.
C'est qu'à l'approche des prochaines élections, il tient à faire des cadeaux aux couches les plus aisées de la population, à tout ce que le pays compte de possédants grands ou petits, car il sait qu'il ne pourra pas compter sur les voix de l'électorat populaire.
Mais que les partisans de Chirac et Raffarin soient majoritaires ou pas dans les urnes, les travailleurs peuvent trouver d'autres moyens de défendre leurs intérêts. Une riposte de l'ensemble du monde du travail est de plus en plus nécessaire et elle est possible!
Les sifflets du stade en ont peut-être donné le signal du départ.