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Leur société
Cadeaux fiscaux à la filière hippique : Étalons-or
En plein été, le 29 juillet, trois ministres se sont rendus au prestigieux haras du Pin, dans l'Orne, une région qui compte de nombreux centres équestres, pour annoncer à un parterre constitué de professionnels du cheval une série de cadeaux fiscaux, qui devraient devenir effectifs cet automne.
Pour l'essentiel, il s'agit du passage au statut d'activité agricole pour les haras et centres équestres divers. Cela se traduira par une baisse de la TVA de 19,5 à 5,5% de la plupart des activités, et par d'autres avantages: déductions diverses, exonérations de la taxe professionnelle à compter des cotisations de 2005, de taxes foncières sur les propriétés bâties servant à l'exploitation, etc.
Les ministres ont justifié ces mesures en expliquant que "le cheval était un animal de nature agricole", une "évidence trop longtemps oubliée". C'est un animal pour lequel "des activités nouvelles se sont créées ou développées -les courses, le sport, les loisirs- sans que le cheval ne quitte sa fonction d'animal de travail". Tout ça pour assimiler les riches du monde des courses hippiques à des paysans besognant dur!
Autre justification de ces cadeaux: l'éternel couplet sur l'emploi, qu'il s'agirait de favoriser. C'est un prétexte parfaitement hypocrite dans la région de Basse-Normandie, sinistrée par les plans de licenciements ces dernières années, dont Moulinex, et où, d'après les ministres, le secteur du cheval emploie 7000 personnes.
Du coup, il est intéressant de voir comment les patrons traitent les employés actuels: dans les nombreux haras privés de la région, pour le personnel entretenant les installations et les chevaux, un salaire de 1000 euros est considéré comme bon. En ce moment commence la période des ventes à Deauville, où sont montrés les meilleurs chevaux. Il faut nettoyer installations et animaux le matin, les accompagner la journée aux expositions, le tout allongeant les journées à 10, voire 12 heures. Dans certains haras, on ne paye pas les heures supplémentaires, on donne une prime annuelle comme forfait, sans bien sûr que les travailleurs s'y retrouvent. Ou on promet des avantages en nature (restaurants, etc.) pour convaincre les ouvriers d'être volontaires et d'accompagner les ventes, "avantages" qui ne sont pas toujours donnés. Pour le surcroît de travail, les patrons emploient aussi stagiaires ou emplois temporaires, à des conditions minimales bien sûr.
Tout ça pour des ventes où les acheteurs dépensent des sommes fabuleuses pour se disputer les chevaux, en étalant au passage leur mépris pour le personnel qui s'occupe des boxes et des bêtes. Dans les haras eux-mêmes, les patrons encaissent de grosses sommes, par exemple plus de 15000 euros (100000 francs) pour chaque saillie des étalons de bon pedigree.
En tout cas, si "le cheval est par nature agricole", les propriétaires sont "par nature" pingres et avides des aides de l'État.