Irak : Le mensonge pour justifier les guerres25/07/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/07/une1825.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

Irak : Le mensonge pour justifier les guerres

Il n'y avait pas besoin d'être spécialiste en affaires militaires pour savoir, bien avant le déclenchement de la deuxième guerre du Golfe et les révélations tardives de David Kelly, que les rapports concernant les armes de destruction massive de l'Irak étaient truqués. Depuis, les révélations se succèdent, provoquant scandales politiques, indignation de la presse ou de divers politiciens. Une indignation bien hypocrite, car tout ce beau monde savait : le mensonge a toujours été utilisé pour justifier les sales guerres de l'impérialisme... et pas seulement par les Etats-Unis.

Le fait que Bush et Blair aient sciemment trompé l'opinion publique à propos de l'armement irakien était déjà une évidence avant la guerre; mais cela devint plus manifeste encore lorsque le conflit se déclencha, et qu'il fallut bien reconnaître que les soldats anglo-américains, malgré tous leurs efforts, n'avaient pas trouvé l'ombre d'une preuve de l'existence de ces armes de destruction massive. Mais qu'importait: le véritable but de la guerre, le renversement du régime de Saddam Hussein et la prise de contrôle des puits de pétrole par les trusts occidentaux, était atteint.

Les méthodes de propagande de la coalition anglo-américaine ont de quoi choquer ceux qui, parmi les populations anglaise et américaine, estiment avoir été sciemment trompés. Les rapports sur les armes de destruction massive, ceux sur les liens supposés entre le régime de Saddam Hussein et l'organisation terroriste Al-Qaïda, ont été gonflés, truqués, voire totalement inventés par des officines spécialisées, comme ce "Bureau des plans spéciaux" aux Etats-Unis, chargé de collationner, synthétiser et éventuellement réécrire les données collectées par les services de renseignement.

Dans certains cas, le bidonnage relève de la comédie. Par exemple, on sait aujourd'hui que le sauvetage héroïque de la GI américaine, Jessica Lynch, au milieu des lignes ennemies, a été une opération de propagande. Selon l'histoire officielle, Jessica, blessée et maltraitée par les soldats irakiens, aurait été sauvée au cours d'une audacieuse opération des forces spéciales américaines. En réalité, comme le raconte Le Monde Diplomatique, la GI en question n'avait pas été blessée dans des combats mais dans un accident de la circulation; les médecins irakiens ont fait l'impossible pour lui sauver la vie; ils s'étaient eux-mêmes arrangés pour la rapprocher des lignes américaines et en avaient complaisamment prévenu l'état-major américain. Et surtout, fin du fin, lors du sauvetage surmédiatisé de la jeune femme, filmé par un réalisateur d'Hollywood... pas un soldat irakien n'était à l'horizon et les GI tiraient à blanc !

Une indignation hypocrite

Mais ces méthodes n'ont rien de nouveau. Lorsque des journalistes, ici, dénoncent "la longue tradition de mensonges d'Etat qui jalonne l'histoire des Etats-Unis", ils feraient bien d'ajouter que l'impérialisme français a, dans ce domaine, de solides références aussi.

Les Etats-Unis sont certes familiers de ce type de méthodes. Depuis l'explosion (accidentelle) du cuirassé américain Maine, qui servit en 1898 d'alibi à l'annexion par les Etats-Unis de Cuba, de Porto Rico et des Philippines, jusqu'aux arguments employés pour envahir, en 1985, le Nicaragua, lorsqu'un ministre américain déclara devant le Congrès que le Nicaragua allait "envahir tout l'hémisphère"... tous les arguments ont été bons pour justifier auprès de la population les agressions de l'impérialisme américain.

Mais en France, pendant la première guerre du Golfe, en 1991, parce que l'impérialisme français était cette fois solidaire des Etats-Unis, la plupart des journalistes ne s'étaient pas privés de relayer complaisamment les mensonges servis par les Etats, américain ou français. On nous disait alors que l'Irak possédait la "4ème armée du monde", que l'incendie des puits de pétrole allait provoquer "l'hiver nucléaire"... Quand TF1 n'allait pas chercher des images du naufrage de l'Amoco Cadiz pour "illustrer" les ravages de la marée noire provoquée par l'Irak.

Et aujourd'hui encore, on voit bien peu de commentateurs dénoncer l'éternel mensonge servi par l'impérialisme français lorsqu'il envoie ses parachutistes sauver la mise à un dictateur africain: on part alors "protéger les ressortissants français". Décidément, l'amour de la vérité est, pour certains, à géométrie variable.

Le mensonge a toujours été une nécessité pour l'impérialisme quand il s'est agi de justifier les guerres, forcément injustes, qu'il a menées. Il n'y a pas de guerre juste, lorsqu'un pays riche déploie toute la puissance d'une armée moderne et suréquipée contre la population d'un pays pauvre ou l'enterre sous les bombes.

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