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Dans le monde
Sida et défense des brevets pharmaceutiques
Le dimanche 13 juillet s'est ouverte à Paris la deuxième conférence sur le sida organisée par l'International Aids Society (IAS) réunissant plus de 5000 chercheurs.
Le sida, la tuberculose, le paludisme touchent 250 millions de personnes chaque année et en tuent 5 millions..
Cette conférence a plus particulièrement traité du sida dans les pays pauvres. Ce n'est pas la première fois que le sujet est abordé. Mais conférence après conférence, la situation, pourtant qualifiée par tous d'inacceptable, est loin de s'améliorer, faute de moyens.
Le développement du sida dans les pays pauvres est directement lié aux inégalités croissantes. Sur 40 millions de malades, 30 millions se trouvent en Afrique. On y compte 8000 victimes par jour.
En Zambie, 20% de la population sont touchés par cette maladie. Au Botswana, 39% de la population adulte étaient touchés fin 2001, contre 36% deux années auparavant.
L'espérance de vie est en chute libre: d'après les évaluations publiées par ONUSIDA, elle passerait en Afrique du Sud, de soixante ans au début des années quatre-vingt-dix à quarante-huit ans pour la période 2000-2005. Au Botswana, elle était supérieure à soixante ans dans les années quatre-vingt, elle tombe aujourd'hui à moins de quarante ans.
Les financements annoncés, déjà notoirement insuffisants, ne sont même pas concrétisés. Le Fonds Mondial espère, si les promesses étaient tenues, (et les versements promis par les pays ne viennent pas) que le chiffre de malades déjà traités en Afrique (30000) soit multiplié par six en six ans. Objectif dérisoire si l'on compare aux trente millions de malades.
Marie-José Mbuzenakamwe, de l'Association nationale de soutien aux séropositifs et sidéens du Burundi a déclaré lors de cette conférence: "Aujourd'hui , le Fonds Global est pratiquement en faillite. Jusqu'à présent, seulement 1,24 milliard de dollars ont été versés par les huit pays les plus riches du monde", alors que les besoins annuels du Fonds sont estimés à 10 milliards de dollars, ajoutant: "Pratiquer la médecine ne consiste pas seulement à traiter les malades mais aussi, par nécessité, de décider qui vivra et qui mourra, parce que nous n'avons que 30 traitements pour 120 malades".
Lors de son voyage en Afrique, le président américain, Georges Bush, a promis 15 milliards de dollars pour la lutte contre le sida (3 milliards par an jusqu'en 2008), mais cette promesse, qui d'ailleurs est soumise à de nombreuses conditions, n'est qu'une promesse parmi d'autres jamais tenues. En 2001, l'ONU avait créé un fonds mondial de lutte contre le sida, lequel devait réunir 10 milliards de dollars. Seuls quelques centaines de millions ont été récoltées.
Depuis 1996, un traitement est disponible: le malade ne meurt plus, la maladie de la mère ne se transmet plus au foetus. Mais ces traitements ne sont accessibles que pour les riches des pays riches.
Des pays comme le Brésil et l'Afrique du Sud se sont donné les moyens de fabriquer des médicaments génériques afin de permettre aux malades de disposer de médicaments anti-VIH. Les laboratoires américains qui disposaient des brevets avaient, à l'époque, engagé des procès contre ces gouvernements. Et encore tout récemment, à Pretoria, George Bush a défendu les compagnies pharmaceutiques et leurs droits de protéger leur "propriété intellectuelle".
L'épidémie du Sida est une catastrophe humanitaire. Tout le monde en convient et même s'en inquiète du seul fait qu'elle ne s'arrête pas aux frontières des pays pauvres.
Et parmi toutes ces bonnes âmes, tous savent qu'on aurait les moyens, sinon d'endiguer l'épidémie, du moins d'en limiter considérablement les effets. Sauf qu'on laisse le mal progresser tout simplement parce qu'il y a les droits de propriété, les brevets, qui protègent les profits des grosses entreprises. Et tant pis si une partie de l'humanité doit en périr ou un continent comme l'Afrique voir une partie de sa population disparaître.
De façon générale, la propriété privée des moyens de production est un scandale, une attentat contre la collectivité.
Mais cela apparaît de façon encore plus criante dans cette question où la défense des droits sur les brevets constitue un arrêt de mort pour des millions de femmes et d'hommes.