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- Lutte ouvrière n°1823
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Dans les entreprises
Métallurgie du Vimeu(Somme) : - Des manifestations sur les retraites aux grèves pour les salaires.
Depuis trois semaines, les grèves se succèdent dans les petites usines de la région du Vimeu dans la Somme. Dans certaines, il n'y avait pas eu de grève depuis plus de trente ans.
Dans ce canton, de nombreuses usines de robinetterie et de serrurerie, de cinquante à quelques centaines d'ouvriers, sont implantées dans de petites communes. La précarité (on trouve des agences d'intérim au milieu de places de simples villages) et les bas salaires sont le lot commun. La plupart des ouvriers ne gagnent que le smic, même après 30 ans d'ancienneté. Les grilles salariales de la métallurgie commencent en dessous du salaire minimum.
"C'est la misère ici", soupire un employé de l'une des usines. Ce que confirment par ailleurs les instituteurs du canton, lorsqu'ils désignent comme obstacle à l'apprentissage de la lecture l'absence de lunettes... trop coûteuses pour les familles.
Pour toutes ces raisons, les ouvriers étaient particulièrement attentifs aux négociations salariales entamées depuis le 27 mai entre les syndicats et les patrons de la métallurgie locale. Le 12 juin, ces derniers proposaient une augmentation annuelle de seulement 2,5%, ne concernant qui plus est que les salariés encore à 39heures.
Entre-temps, les manifestations contre la réforme des retraites avaient permis aux ouvriers de se retrouver, de discuter ensemble, d'éprouver la force de leur nombre. Les enseignants et leurs syndicats s'étaient volontairement retrouvés à de nombreuses reprises en contact avec les salariés du privé: lors de diffusions de tracts devant les usines, puis lors des manifestations.
De fortes délégations des usines du privé avaient d'ailleurs pris la tête de la manifestation du 3 juin. Les débrayages avaient entraîné ce jour-là de 20 à 80% des salariés de nombreuses entreprises. Le succès de ce mouvement est allé en grandissant et le nombre de manifestants a dépassé les 2000 dans la petite ville de Friville (qui, elle-même, ne compte guère plus de 4000 habitants). À l'opposition contre les réformes du gouvernement se mêlaient ainsi les revendications salariales.
Le 19 juin, la manifestation commune des enseignants et des ouvriers forçait le président du Conseil régional de Picardie, Charles Baur, à renoncer à sa réunion sur la zone industrielle et à repartir précipitamment face aux huées des grévistes. Le même jour, la grève reconductible démarrait dans une première entreprise, une serrurerie. Après six jours de grève, le patron accordait 5,5% d'augmentation. Immédiatement l'usine voisine entamait la lutte et obtenait 4,8%. Une autre entreprise arrachait 5,5% et le treizième mois. En une quinzaine de jours, dix entreprises ont ainsi été touchées et les salariés de cinq d'entre elles ont déjà obtenu 5% d'augmentation.
L'exemple des grévistes de l'Éducation a secoué une résignation particulièrement marquée dans cette région. La volonté des enseignants de s'adresser aux salariés du privé en multipliant les contacts aux portes des entreprises a permis de créer des liens qui perdurent encore. Ainsi le 3 juillet, le ministre de l'Industrie, Francis Mer, a été accueilli par une manifestation de plusieurs centaines d'ouvriers et d'enseignants lors de sa visite aux patrons de la région. Le lendemain, le cocktail du patronat local a été chahuté.