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- Lutte ouvrière n°1823
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Leur société
Intermittents en lutte : Un spectacle très populaire dans tout le pays
Les travailleurs du spectacle, et plus particulièrement ceux qui d'ordinaire ne tiennent pas le haut de l'affiche, continuent à exiger haut et fort l'abandon du plan de réforme de leur système d'indemnisation. Il faut dire que c'est la survie professionnelle de près du tiers d'entre eux qui est en jeu.
En une semaine les choses ont changé. Il y a huit jours le ministre de la Culture, Aillagon, proposait des leçons de lecture à l'intention des dizaines de milliers d'intermittents, qui d'après lui n'avaient pas compris ce que la nouvelle convention signée par le patronat et trois syndicats minoritaires, dont la CFDT, pouvait avoir de positif. Mais ces déclarations arrogantes n'ont en rien entamé la détermination des intermittents qui avaient très bien lu et compris qu'on voulait leur enlever l'essentiel de leur droit à être indemnisés. La CGT du spectacle a répondu du tac au tac au ministre que, s'il voulait faire faire des économies à la caisse d'indemnisation des intermittents, il suffisait de faire respecter les lois du travail, en imposant que l'on mette fin aux pratiques des employeurs de ce secteur. Cela permettrait de faire disparaître le tiers de "faux" intermittents du spectacle, techniciens de toutes les catégories, qui se retrouvent contre leur gré dans un statut précaire, du fait des entreprises qui les emploient. Ayant un contrat, ils cesseraient, de ce fait, d'être intermittents.
Il a fallu huit jours, des manifestations et l'annonce de la grève générale dans tous les festivals, pour que le ministre se dise choqué des abus des entreprises qui violaient le droit du travail. Du coup, il demandait la réouverture des négociations entre le Medef et l'ensemble des syndicats, y compris les non-signataires de l'accord contesté, proposant quelques aménagements à l'accord signé. Aménagements que les intermittents en lutte trouvent insuffisants. Du coup, l'ouverture symbolique du festival d'Avignon a été annulée. Ceux d'Aix-en-Provence, de La Rochelle sont compromis.
Le gouvernement, derrière Aillagon, s'est cru le vainqueur final de la bataille des retraites. Il pensait peaufiner avec ce conflit son image d'inflexibilité. C'est raté! Surtout parce que des milliers d'intermittents en lutte leur ont répondu par un bras d'honneur, continuant avec encore plus d'ampleur leur mouvement. Le coup de grâce est venu de l'immense flop de la mise en scène de Corse. Cela explique sans doute la reculade partielle d'Aillagon du 7 juillet.
Le lendemain, Aillagon a eu le culot de prétendre que le gouvernement n'était pas impliqué dans la situation faite aux intermittents. Ni dans l'accord qu'ils contestent, puisqu'il s'agirait d'un accord patronat-syndicats. Il oublie que France Télévision, sans compter les sociétés de production qui assurent l'essentiel des programmes, emploie à elle seule près de 3000 intermittents du spectacle, techniciens de toutes catégories, etc. Le principal employeur dans l'illégalité est une entreprise de l'État. La seule télévision publique et les sociétés de production qui lui sont liées utilisent quelques autres milliers d'intermittents supplémentaires. Les mêmes professions étaient employées naguère à plein temps dans feu l'ORTF, ou la SFP. Sans parler de TF1 qui fut privatisée et vendue au roi du béton Bouygues.
Ce qu'il y a d'encourageant dans le mouvement des intermittents qui a accompagné, puis succédé aux mouvements de ce printemps, au-delà de leurs revendications entièrement justifiées, c'est qu'il maintient la flamme de la contestation sociale. Enseignants hier, intermittents aujourd'hui, ces secteurs qui ne subissent pas le poids le plus lourd de l'exploitation du monde du travail font jaillir cette vérité, que cette société d'exploitation est divisée en deux camps: celui des profiteurs et des gouvernants entièrement à leur service d'un côté, et celui des exploités de l'autre. Et les luttes de ce camp-là renforce tous les exploités.