Perquisitions, opérations de ratissage, blindés en tête, arrestations arbitraires, les troupes anglo-américaines en Irak multiplient les raids. Cette nouvelle campagne a un nom: "Crotale du désert", le serpent américain venimeux.

C'est que les armées d'occupation soulèvent l'hostilité de la population, ont à faire face à des attaques armées, des sabotages de pipelines. Six soldats britanniques tués mardi 24 juin de Bassora. Quatre soldats américains tués et une dizaine de blessés le mercredi. Un autre gravement blessé le lendemain dans un magasin en plein Bagdad. Quatre autre tués mardi 1er juillet.

"Il faut leur donner le message "pas d'embrouille avec nous"" et montrer notre "puissance de feu", déclare un officier américain. Les démonstrations de forces pour impressionner, voire terroriser la population, c'est bien la seule chose que les Anglo-Américains puissent faire face à une guérilla qu'on ne peut probablement attribuer ni aux seuls anciens partisans du Baas, comme prétendent les américains, ni à des restes organisés de l'armée. Avec les anciens militaires irakiens, ce sont d'autres difficultés qu'a eu le gouverneur américain: les manifestations pour obtenir leurs payes.

Mais, devant la presse, le ministre américain de la défense, Rumsfeld a réfuté le terme "d'enlisement". "Nous sommes en guerre [...], en guerre mondiale contre le terrorisme, et ceux qui ne sont pas d'accord avec cela sont pour la plupart des terroristes", a-t-il dit. Deux mois après la fin de la guerre annoncée solennellement par Bush, la guerre continue. Et Rumsfeld de déplorer le trop faible engagement des pays de l'OTAN. Quand on entend la ministre française déléguée à l'industrie, Mme Fontaine, annoncer que TotalFinaElf pourrait se voir prochainement confirmer les contrats d'exploitation en Irak signés du temps de Saddam Hussein, on se dit que l'appel du pied aux alliés récalcitrants est peut-être sincère... et monnayable.

La guerre d'Afghanistan elle-même n'est pas finie: deux soldats allemands tués le 7 juin, un américain le 25. Et le contingent canadien qui doit arriver en renfort devrait être "armé jusqu'aux dents", selon le gouvernement canadien. Pour ne pas trop s'y dépenser, les USA en sont à reprendre langue avec une partie des chefs talibans réfugiés au Pakistan, pour trouver un contrepoids aux autres courrant islamistes qu'ils ont propulsé au pouvoir en renversant ces mêmes talibans. Le serpent se mort la queue!

Alors on nous présente au moins la trêve que viennent d'accepter en Palestine, pour trois mois, les deux principaux mouvements islamistes, le Hamas et le Djihad islamique, comme un pas vers la paix, une victoire de la fameuse "feuille de route" que Bush patronne depuis le lendemain de sa "victoire" en Irak, avec l'appui des gouvernements européens. Bien plus qu'à un plan de paix, cette "feuille de route" ressemble à un plan de partage des tâches de police.

La trêve n'est la contrepartie d'aucune concession de la part d'Israël. Pas même de la garantie qu'Israël ne continuera pas ses raids militaires en territoires palestiniens. Elle n'est que le fruit des pressions exercées par les États-Unis et leurs alliés sur l'autorité palestinienne pour lui imposer de faire, elle-même, la police contre tous ceux qui, en Palestine, pourraient s'en prendre aux troupes israéliennes ou préparer des attentats.

Israël vient de retirer ses troupes de la principale route de la bande de Gaza, pour y laisser la place à la police palestinienne. Mais elles ne sont pas parties loin. Et on a pu voir à la télévisions les images du contrôle quotidien des ouvriers palestiniens à l'entrée de la zone industrielle israélienne d'Erez. Une zone où les Palestiniens de Gaza sont quelques 4000 à venir travailler, et qui, d'après un rapport de la Commission des droits de l'homme datant de 1999, est l'une de celles où "la situation des travailleurs palestiniens serait la plus dure": "comportements frauduleux des employeurs israéliens", patrons qui "menacent leurs employés palestiniens qui réclament leurs droits de les licencier ou de dire à la police qu'ils ont essayé d'attenter à leur vie".

Et l'armée israélienne maintien dans la bande de Gaza une forte présence, pour protéger les quelques 7000 colons qui s'y sont implantés. Car il n'est pas question de s'en prendre aux colonies installées en territoire palestinien, ni, pour l'instant, d'interrompre la construction du mur qu'Israël érige autour des territoires autonomes palestiniens.

Pas question non plus de reconnaître la moindre trêve avec le Hamas ou le Jihad. Ni pour Sharon, ni pour Bush qui invite les gouvernants du monde entier à faire d'eux des ennemis à abattre, au nom de la "guerre contre le terrorisme". C'est l'autorité palestinienne qui a négocié avec les mouvements islamistes la trêve et qui est chargée la leur faire respecter ou de les combattre. Cette méthode est un peu un serpent de mer de la "politique de paix" américaine en Palestine: assurer la police face à une population révoltée, c'était déjà en grande partie le rôle dévolu à l'autorité palestinienne lors de sa mise en place, dans le cadre des accords d'Oslo.

Avec pas plus de chance qu'alors d'engendrer une quelconque paix, tant que l'oppression et la misère susciteront la révolte.

Olivier Belin.

Convergences Révolutionnaires n° 27 (mai-juin 2003), bimestriel édité par la Fraction
Un dossier sur l'industrie de guerre et le trafic d'armes à l'heure de la mondialisation.
Éditorial: "Pour que la rue gouverne"
Des articles : Sur les grèves de l'Éducation nationale, le 32e congrès du PCF, les Sans-papiers ou la drôle de "victoire de la démocratie contre Le Pen", L'individualisation des salaires et leur régression, la situation du capitalisme américain, l'enjeu du pétrole en Algérie, la rage des sidérurgistes en Belgique.

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