Violences policières, arrestations arbitraires, des intimidations qui ne passent pas19/06/20032003Journal/medias/journalnumero/images/2003/06/une1820.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Violences policières, arrestations arbitraires, des intimidations qui ne passent pas

Le mardi 10 juin, des milliers de manifestants défilaient à Paris contre les projets Ferry et Fillon de la Bastille à place de la Concorde, qui se trouve de l'autre côté de la Seine face à l'Assemblée nationale où commençait la discussion sur le projet de réforme des retraites. Alors que le flot des manifestants continuait à affluer vers la Concorde, les forces de l'ordre ont commencé à jeter des bombes lacrymogènes. Puis vers 20h30, elles décidaient d'évacuer la place à l'aide de canons à eau. Des centaines de manifestants ont dû refluer vers la place de la Madeleine puis de l'Opéra, poussés par la force des jets d'eau et aveuglés par la fumée des lacrymogènes. Comme les CRS chargeaient, que les rues adjacentes étaient bloquées, quelque 300 manifestants, paniqués, se sont réfugiés dans l'enceinte de l'Opéra, au moment de l'entracte de la représentation en cours. Plutôt que d'accepter la sortie dans le calme que demandaient les réfugiés dans l'Opéra, les forces de l'ordre ont choisi la manière forte. Des CRS sont entrés par l'arrière du théâtre et ont poursuivi, bousculé et frappé tous ceux qui se trouvaient sur le passage. Des spectateurs ont même été molestés, voire même arrêtés! Finalement, 58 personnes ont été amenées à la caserne de la porte Pouchet sans que leur soient notifiées les raisons de leur garde à vue. Parmi eux des instituteurs, des enseignants, des agents de l'EDF, de la RATP, de la SNCF, de l'ANPE, un jardinier, des intermittents du spectacle, un maquettiste, un ambulancier...

La nouvelle de ces arrestations a aussitôt circulé, en particulier dans l'assemblée générale des établissements en lutte qui se tenait au même moment, dont les participants se sont rendus devant la caserne, réclamant que l'on libère les manifestants arrêtés.

Alors que le soir même et le lendemain les médias parlaient de quelque 200 "casseurs" et "extrémistes" de la place de la Concorde, l'indignation gagnait tous ceux qui se battent depuis des semaines contre les projets du gouvernement. Dans les établissements scolaires, les assemblées de ville, rendez-vous était donné pour être présent devant le palais de justice où les manifestants arrêtés devaient passer en comparution immédiate pour "violence en réunion" et "destruction de bien public". Finalement, le soir même, tous, sauf deux, étaient relaxés. C'est dire à quel point les témoignages soulignaient le fait que la violence venait des CRS et non des manifestants.

Le ministère public entendait reporter toute la responsabilité des incidents sur un enseignant et un étudiant, ciblés puisque portant un mégaphone, ou un tee-shirt marqué politiquement et un couteau dans un sac à dos. Il a même été jusqu'à ordonner la perquisition de l'appartement de ces dangereux "terroristes"! Mais face à l'évidence des faits, et face surtout à la réaction de centaines de manifestants marquant leur désapprobation et leur indignation, il avait abandonné lors du procès du vendredi 14 juin les deux principaux chefs d'inculpation, ne retenant que celui de... port d'arme de 6e catégorie! La montagne accouchait d'une souris!

D'autres arrestations ont eu lieu à l'occasion de la manifestation du 10 juin. Six manifestants ont été arrêtés place de la Concorde. Deux ont été relaxés, deux condamnés à trois mois de prison avec sursis et deux autres doivent comparaître le 26 juin. Là encore, c'est l'arbitraire et la volonté d'intimidation qui prévalent.

Face à un mouvement fort, qui dure depuis des semaines, le gouvernement a cru qu'il pouvait jouer de l'intimidation, le discréditer. Il n'a contribué qu'à renforcer les convictions des grévistes.

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