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Leur société
Sécurité sociale : Bientôt un lointain souvenir?
La remise en cause de la Sécurité sociale s'accélère. Ce n'est certes pas la première fois qu'un gouvernement s'efforce de réduire les remboursements de médicaments ou de soins médicaux, mais aujourd'hui cela se fait à une échelle sans précédent.
Le temps est loin où la Sécurité sociale remboursait (avant 1958) la quasi-totalité des médicaments et des prestations médicales à 80%. La diminution des remboursements par les caisses de Sécurité sociale a accru d'autant le rôle des mutuelles, et laisse la porte ouverte à leur développement et à celui, depuis ces deux dernières décennies, des assurances-maladie privées, la différence entre les premières et les secondes étant depuis longtemps malaisée à mettre en évidence, au vu des relations multiples qui unissent les mutuelles à la sphère de la banque et de l'assurance.
La contraction en peau de chagrin de l'assurance-maladie offre aux unes et aux autres un immense marché, en particulier aux compagnies d'assurance qui visent ceux qui peuvent souscrire toute une variété de contrats contre espèces sonnantes et trébuchantes.
La création de la Sécurité sociale n'a pas été une "conquête sociale" de la Libération, contrairement à ce que prétend la gauche réformiste. Succédant aux "assurances sociales" qui existaient avant la Deuxième Guerre mondiale, et qui avaient été créées par le patronat dans le même esprit, la Sécurité sociale a été mise en place pour éviter que le monde du travail ne revendique des salaires permettant à chaque salarié d'affronter les risques de maladie ou d'accident. Elle a été, dans une situation où la bourgeoisie avait plus que jamais besoin des efforts des travailleurs, mais craignait leurs réactions, la contrepartie d'une politique de bas salaires défendue alors dans les faits par tous les partis politiques, y compris le PCF et le PS, au nom de la nécessité de reconstruire le pays. Cette reconstruction s'est faite au seul profit de la bourgeoisie. Mais dans ce contexte la Sécurité sociale a permis aux plus pauvres, lorsqu'eux ou leurs familles étaient malades, de pouvoir se soigner, de bénéficier de médicaments et de prestations médicales auxquels ils n'auraient jamais pu accéder avec leurs seuls salaires.
Mais le recul, la démoralisation, entraînés par vingt-cinq ans de chômage et des années de gouvernements de gauche menant une politique semblable à celle de la droite, a aiguisé les appétits des possédants et du gouvernement à leur service, qui préféreraient que l'argent consacré à la Sécurité sociale (et qui n'est que du salaire différé) profite plus directement au patronat. Et bien évidemment ce sont les plus pauvres qui feront le plus les frais des attaques contre la Sécurité sociale. Ceux des travailleurs qui le peuvent paieront des cotisations de mutuelles de plus en plus chères ou des primes d'assurances de plus en plus élevées. Pour les autres, qui n'auront pas les moyens de souscrire ces assurances, ou seulement des contrats de base, la maladie redeviendra, comme elle l'est déjà pour un certain nombre, la catastrophe qu'elle était au XIXe siècle ou au début du XXe.
La "réforme" de Chirac-Raffarin, c'est un retour en arrière.