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Dans les entreprises
GIAT Industries(Saint-Chamond, Loire) : Rien n'est réglé
Le mercredi 16 avril, c'est à environ trois mille que les travailleurs de GIAT Industries des différents sites se sont retrouvés à Paris, d'abord devant le lieu de réunion du comité central d'entreprise, dans le quartier Montparnasse, puis devant le ministère de la Défense. Visiblement, le projet de la direction et du gouvernement de supprimer 3 940 emplois sur les 6 350 de l'entreprise, avec la fermeture de trois usines, dont celle de Saint-Chamond, n'est pas passé auprès du personnel.
La réunion du CCE a été des plus brèves, la direction annonçant dans les trente minutes qu'elle acceptait l'ouverture d'une négociation à partir du 24 avril, sur un accord de méthode. Personne ne sait très bien ce que cela peut signifier, mais les dirigeants syndicaux (CGT, CFDT, FO et CGC) ont présenté immédiatement cette proposition comme une victoire. Une bonne partie des manifestants la perçurent aussi de cette façon et commentaient: "Au moins, on n'est pas venus pour rien." Les mêmes responsables indiquaient qu'à leur avis, la lutte devrait se continuer sous d'autres formes.
La manifestation se formait alors pour aller jusqu'au ministère de la Défense, en un cortège coloré et bruyant. Reçus par des conseillers de la ministre, les dirigeants syndicaux en sortaient plus tard, alors que la manifestation s'était dispersée pour permettre le retour des manifestants, en indiquant qu'ils avaient eu une promesse d'une réunion entre eux et des responsables de la Direction Générale de l'Armement "avant toute reprise des réunions de CCE à GIAT Industries". Le commentaire de la CGT, dans un tract du lendemain, était "Un espace de négociation est ouvert" et, à propos de cette réunion avec la DGA: "C'est une information vitale pour construire un projet alternatif au plan de la direction. Pas question de s'enfermer dans une quelconque négociation d'un plan."
Les choses vont-elles se passer comme cela? Les quatre fédérations des industries d'armement, celle de la CGT en particulier, se disent fortes d'avoir des propositions sérieuses à faire en matière de fabrications. Ce n'est probablement pas une position de départ bien avantageuse alors qu'il s'agirait de défendre les intérêts des travailleurs en priorité, au lieu de se mettre à la place du gouvernement ou de la direction et de leurs soucis en matière de fabrications militaires.
Mais surtout, les syndicats ont saisi cette possibilité de présenter ces négociations comme une victoire, alors qu'il n'y a pas un millimètre de ligne de changé, pour le moment, dans le projet de la direction du GIAT Industries et du gouvernement.
Les travailleurs, au sortir de la manifestation, semblaient plutôt satisfaits, disant: "C'est rudement bien ce qu'on a fait." Certains pensaient que cela pouvait leur éviter d'avoir à se lancer dans un mouvement de grève, sur une période qui risquait, à leurs yeux, d'être longue.
Le jeudi matin 17 avril, à l'usine de Saint-Chamond, un seul des deux piquets se remettait en place, beaucoup de travailleurs n'étaient pas là et, parmi les présents dans les services, les propos sur les décisions à prendre étaient prudents. Rappelons que, depuis le 7 avril, date d'annonce du projet de la direction, aucun travail n'est effectué, des piquets aux portes filtrent les entrées, des actions ont lieu tous les jours après l'assemblée générale mais, formellement, personne n'est en grève et le personnel demande et compte bien qu'il n'y ait pas de retenues sur la paye.
A l'assemblée générale de l'après-midi, tout le personnel était présent, y compris des chefs de service qui s'étaient fait remballer par les piquets les jours précédents. Les responsables des quatre syndicats prenaient la parole, parlant de "pas en avant" et proposant de reprendre le travail normalement. Ils annonçaient ensuite la tenue de forums de discussion dans les ateliers et services dans les jours à venir, puis une journée d'action sur tout le GIAT le jeudi 24, date de démarrage des négociations, et une manifestation interprofessionnelle à Saint-Chamond pour le vendredi 25. Plusieurs travailleurs intervinrent pour souligner l'opportunité d'organiser une manifestation interprofessionnelle en même temps que le CCE et sur les initiatives à prendre tous les jours afin de maintenir la pression. D'autre intervenants protestèrent contre la présence dans l'assemblée d'une maîtrise antiouvrière, affirmant qu'il ne serait admis aucune attitude revancharde de la part de cette maîtrise. Il fut aussi proposé l'organisation d'une journée portes ouvertes pour le jeudi 24. A toutes ces propositions les responsables répondirent en répétant ce qu'ils avaient dit et, finalement, la quasi-totalité de l'assemblée approuva les propositions syndicales.
Mardi 22, après le week-end de Pâques, il n'y avait toujours aucune production qui sortait. A l'atelier NBC, la direction est intervenue à deux reprises avant de pouvoir faire ouvrir la porte, mais cela ne change rien: il n'y a que le chef de service et son adjoint qui prétendent faire quelque chose.
La manifestation interprofessionnelle annoncée pour le vendredi 25 a été annulée: les syndicats préfèrent rencontrer ce jour-là les députés et sénateurs du département. On doute que cette énième entrevue apporte plus que les précédentes. Mais, en tout cas, les travailleurs de GIAT Saint-Chamond expriment clairement que, pour eux, rien n'est réglé.