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- Lutte ouvrière n°1806
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Dans les entreprises
Metaleurop : Licenciés et matraqués
Le 6 mars, les travailleurs de Metaleurop et leur famille manifestaient dans les rues de Lens, rejoints par de nombreux travailleurs des entreprises de la région. Au total, 1 500 personnes et une manifestation dynamique et déterminée, comme on en n'avait pas vu à Lens depuis longtemps.
Le ministre Jean-Paul Delevoye, ministre de la Fonction publique et maire de Bapaume, celui-là même qui s'était présenté comme un "régional du gouvernement" et avait assuré les travailleurs de Metaleurop de toute sa sympathie et son soutien, se trouvait opportunément en sous-préfecture. Les travailleurs de Metaleurop ont donc logiquement réclamé qu'il sorte pour préciser de quel soutien il s'agissait. Mais au lieu du ministre, ce sont plusieurs dizaines de CRS qui sont sortis en trombe et ont commencé à matraquer, puis à jeter des bombes lacrymogènes.
Une bagarre a suivi et France 3 en a montré les images parce qu'un député PS, Albert Facon, s'est retrouvé à terre, victime d'un malaise. Il s'en est remis, mais un travailleur a eu le genou fracturé. Ces images ont encore renforcé le sentiment de solidarité dans toutes les entreprises de la région, un sentiment qui se manifeste par de nombreuses visites sur le site de l'usine et des collectes. Malheureusement, cette solidarité ne trouve pas à s'exprimer dans une lutte générale car les syndicats n'y sont visiblement pas prêts. Même la manifestation de la CGT à Lille, le 8 mars, n'était guère préparée, et n'a rassemblé que 450 personnes. Au lieu de s'appuyer sur la mobilisation des salariés de Metaleurop qui avait réussi à Lens, l'union départementale CGT a organisé une manifestation séparée, et le calendrier des mois de mars et avril montre des dates différentes pour toutes les corporations, alors qu'il faudrait une lutte d'ensemble. Quant aux autres syndicats, ils ne proposent tout simplement rien.
La liquidation judiciaire de l'usine Metaleurop de Noyelles-Godault (Pas-de-Calais) a été prononcée par le tribunal de Béthune le 10 mars. Le doute subsiste encore sur le paiement des salaires de mars. Est-ce que Metaleurop les paiera encore ou est-ce que c'est déjà l'AGS (Association de Garantie des Salaires) qui va prendre le relais? Mais la pire des inquiétudes est de ne même pas avoir la perspective d'un plan social garantissant de vivre décemment, avec le paiement des salaires et des retraites. Les pouvoirs publics ne promettent rien, ou plutôt refusent de discuter d'un dédommagement financier des travailleurs car, a dit le sous-préfet, "l'État ne peut pas verser des compensations à la place des employeurs privés".
Mais justement, l'employeur a mis les voiles et il a brouillé les pistes derrière lui. Les travailleurs répondent à juste titre que l'État n'a qu'à avancer l'argent, puis se retourner ensuite contre Glencore, l'actionnaire principal, que le gouvernement avait promis d'attaquer en justice.
La lutte continue donc. Pour l'instant, l'usine a l'air d'un camp retranché, avec des lingots de zinc de deux tonnes qui barrent l'entrée. Mais les assemblées générales continuent tous les matins. Elles ont même changé d'allure car de plus en plus d'épouses sont maintenant aux côtés de leurs maris. Les journalistes l'ont remarqué et les questionnent souvent. Mais comme le disait l'une de ces femmes, "ils voudraient surtout nous voir pleurer. Mais ce qu'il faut, c'est pas pleurer, mais lutter jusqu'au bout!"
ERRATA (en date du 16/03/2003) - Contrairement à ce qui a été écrit par erreur dans notre article, ce n'est pas l'union départementale CGT qui a pris l'initiative d'une manifestation séparée de Metaleurop. En fait, la manifestation du 6 mars a été organisée par l'Union Syndicale de la Métallurgie GGT (USM-CGT), en opposition à celle du 8 de l'union départementale, ajoutant encore à la dispersion du calendrier des mois de mars et avril de l'union départementale CGT qui montre des dates différentes pour toutes les corporations.