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Tribune de la minorité
Guerre contre l'Irak : Chirac s'apprête à emboîter le pas à Bush
Les États-Unis accélèrent leurs envois de troupes dans le Golfe. D'ici la fin janvier, 50 000 hommes supplémentaires devraient s'ajouter aux 65 000 militaires américains déjà à pied d'oeuvre pour la guerre d'Irak. Un navire hôpital de 1000 lits prend également la route. Le gouvernement britannique, lui, s'apprête à envoyer 20 000 soldats supplémentaires. L'offensive sur le sol irakien, si elle est définitivement décidée, pourrait débuter au mois de février.
Quant à la presse américaine, elle vient de faire état d'un plan de gouvernement direct de l'Irak par des autorités d'occupation, avec éventuellement la couverture d'un administrateur civil nommé par l'ONU. Que le gouvernement américain fasse publier par le New York Times ce plan ne veut pas forcément dire que ce soit ni sa seule hypothèse de travail pour le remplacement de Saddam Hussein, ni celle qui lui paraisse la plus favorable. Et s'il a commencé depuis des mois cette seconde guerre d'Irak par des séries de bombardements destinés non seulement à éliminer d'entrée tous les dispositifs de défense de l'armée irakienne mais aussi à épuiser et terroriser la population, et s'il hésite et prend son temps avant de lancer des troupes sur le sol irakien, c'est que la plus grosse difficulté n'est pas la résistance de l'armée irakienne, qui ne fait pas le poids face à l'armada américaine, mais l'hostilité à l'occupant de la population irakienne. En annonçant qu'il envisage une occupation militaire sur un an, un an et demi, voire plus, il prépare sa propre opinion publique à une opération longue et coûteuse.
Pas de merci, sauf pour les installations pétrolières
Et s'il est, dans le plan annoncé comme dans les récentes déclarations du ministre américain des affaires étrangères Colin Powell (ancien chef d'État-major lors de la première guerre d'Irak), un aspect caractéristique des buts de la guerre, c'est d'afficher comme premier souci des opérations militaires à venir et de l'éventuel gouvernement provisoire la nécessité d'assurer la sécurité et le fonctionnement des exploitations pétrolières. Il ne faudrait pas que la guerre, en stoppant la production pétrolière irakienne, ne fasse flamber le cours du pétrole. Quant aux revenus pétroliers de l'Irak d'après Saddam, ils serviraient, disent les Américains, à financer la reconstruction, disons plutôt à engraisser les trusts chargés des grands travaux dans un pays dévasté.
Côté français, ne pas louper la curée de la reconstruction...
C'est pour ces mêmes raisons qu'au moment où s'accélère la préparation des opérations militaires américaines en Irak, les réticences affichées du gouvernement français à la guerre américaine commencent à fondre. Certes les hommes d'affaires français étaient d'autant moins pressés de voir les USA se lancer dans une nouvelle guerre contre l'Irak qu'avec le programme pétrole contre nourriture, qui aménageait un peu l'embargo, les affaires commerciales française en Irak, notamment les ventes de biens d'équipements et de matériel automobile, avaient commencé à reprendre. Et TotalFinaElf avait obtenu du gouvernement irakien actuel des promesses de contrats d'exploitation de champs pétrolifères pour l'après-embargo. Mais ce serait, pour ces gens-la, se les faire souffler, comme se faire souffler toute participation aux marchés de la reconstruction du pays, que d'être hors du coup lorsque les USA décideront de se lancer dans la guerre.
Donc tenir... jusqu'au déclenchement des opérations
Alors aujourd'hui que les préparatifs s'accélèrent, le ton des gouvernants français change. " Tout essayer pour éviter la guerre " revient pour le gouvernement français à " tenir jusqu'au 27 janvier " expliquent, selon Le Monde, le président UMP de la commission des affaires étrangères du Sénat, et un député UMP membre de la commission parlementaire correspondante. Ce jour-là se terminera la mission des inspecteurs de l'ONU en Irak, mission pendant laquelle les bombardements anglo-américains sur l'Irak n'ont pas cessé et dont le seul objectif était pour les USA de se donner du temps, avant de décider d'apprécier comme bon leur semblera le résultat desdites inspections. " Je ne sens pas le gouvernement sur une ligne qui reviendrait à se démarquer de la ligne américaine ", rajoute le député UMP, " parce qu'il y aura eu respect de la procédure ONU, on va y aller ".
Et le Charles-de-Gaulle appareillera
Le gouvernement, lui, est pour l'instant plus discret. Mais il a d'ores et déjà annoncé que le porte-avions Charles-de-Gaulle sera prêt à appareiller pour la fin janvier. Les gestes grandiloquents de Chirac à l'automne dernier pour exiger que, si guerre il y a, elle ne relève pas du simple diktat américain mais soit décidée par l'ONU, n'avait d'autre but que de revendiquer d'y avoir son mot à dire et d'y être associé.
On nous dira alors probablement ici, comme le gouvernement américain le dit déjà aux USA, que si on envoie des troupes en Irak c'est pour libérer le peuple irakien d'un dictateur ; si on occupe le pays c'est pour y rétablir la démocratie ; et si on s'intéresse à son pétrole c'est pour le rendre au peuple irakien et s'en servir à redresser le pays.
Mensonges.
La guerre qui se prépare sera, une fois de plus, une guerre pour le contrôle des ressources pétrolières, une guerre de pillage. Une guerre dont le peuple irakien, déjà massacré et appauvri par la guerre de 1991 et dix ans d'embargo, sera la principale victime, mais dont nous, les travailleurs des puissances impérialistes qui la feront, payeront également la note. Non à la guerre contre l'Irak !