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Dans les entreprises
EDF-GDF : Un projet d'accord sur les retraites qui passe mal
Le projet d'accord sur les retraites entre la plupart des fédérations syndicales d'une part et les directions et le patronat des IEG (Industries électriques et gazières) d'autre part, baptisé " relevé de conclusions ", provoque des remous dans les milieux syndicaux et parmi le personnel.
Selon la direction d'EDF, reprise par le Journal du Dimanche, 63 % des agents seraient d'accord avec le texte proposé. Il s'agit vraisemblablement d'un sondage bidon, même s'il est exact que bien des agents hésitent et se demandent si le " relevé de conclusions " n'est, après tout, peut-être pas si mauvais, ou en tout cas moins pire que ce qu'il aurait pu être.
C'est qu'en effet le texte est loin d'être clair. Nulle part il n'est écrit que les cotisations pour la retraite des agents vont passer de 7,85 % du salaire brut à environ 12 %. Ce qui est écrit c'est : " Les cotisations seront harmonisées sur le niveau correspondant aux régimes de solidarité interprofessionnelle. Les modalités de cette harmonisation seront négociées par les partenaires sociaux. "
Nulle part il n'est écrit que le personnel risque de se voir imposer, comme l'ensemble de la Fonction publique, la règle des 40 annuités de cotisations pour toucher une retraite complète, et qu'en conséquence ce projet d'accord n'est valable que... jusqu'au printemps 2003, dans quelques mois. Ce qui est écrit c'est : " Les prestations du régime des IEG ne sont donc pas modifiées. Celles-ci évolueront dans le cadre de la négociation de branche, à l'initiative des partenaires sociaux ou des pouvoirs publics au regard des évolutions des régimes de retraites. "
Et tout le reste est à l'avenant. Ce texte - comme souvent dans ce genre de situation - est fait pour tromper son monde et embrouiller les choses.
Les dirigeants fédéraux de la CGT, ainsi que ceux de la CFDT, de la CGC et de la CFTC qui ont accepté de négocier, présentent le projet d'accord comme une avancée. Le projet permettrait de sauver l'essentiel, disent-ils. Ce qui est l'exact opposé de la vérité.
Dans le concert où se retrouvent à l'unisson les médias, les directions d'EDF-GDF ainsi que les principales directions syndicales, dans lesquelles un grand nombre d'agents ont encore confiance (après tout, ce sont elles qui ont appelé à la manifestation du 3 octobre !), certains ont du mal à admettre que ce " relevé de conclusions " montre que les syndicats négociateurs se sont alignés sur ce que voulaient les directions d'EDF-GDF, le patronat, et le gouvernement.
Mais plus le texte circule, plus il est commenté, discuté, plus l'opposition se fait jour, car ce " relevé de conclusions " révèle, même si c'est loin d'être dit clairement, que :
- Les retraites des agents d'EDF-GDF ne seront plus payées par l'entreprise, mais par une caisse dite IEG Pensions. A l'avenir, elles ne seront pas garanties par l'État, alors qu'aujourd'hui elles sont garanties, à moins d'une faillite d'EDF-GDF.
- Les cotisations passeront de 7,85 % à environ 12 %.
- La voie est ouverte - par le texte lui-même - à une nouvelle attaque d'ici quelques mois, qui remettra en cause non seulement les 37,5 annuités de cotisations, mais aussi le montant des pensions des électriciens et des gaziers. Celui-ci est calculé sur la base de 75 % du dernier salaire, et pourraient passer à la moyenne des 25 dernières années, comme dans le régime général.
- Il y aura nécessairement une modification du statut, ce qui créera un précédent bien peu engageant pour l'avenir.
- Enfin, la voie est libre pour l'ouverture du capital d'EDF et de GDF.
Bref, les directions, le patronat et l'État ont obtenu tout ce qu'ils voulaient.
Et en échange, les directions EDF-GDF ont concédé un misérable relèvement du coefficient minimum de pension et une amélioration des pensions de réversion (de 50 % à 54 % des salaires). La voilà, la seule avancée dont se targuent les partisans de l'accord. C'est indécent et insultant !
La fédération CGT (le syndicat majoritaire) voudrait faire passer ce projet d'accord en force. Ou plus exactement la tendance de Denis Cohen, le secrétaire général, principal négociateur et partisan acharné de signer l'accord. Elle voudrait, comme le gouvernement cherche à l'imposer, signer ce texte au plus tard le 20 décembre, ce qui empêcherait toute consultation de la base. Pour ce faire, elle multiplie les manoeuvres, convoquant une Commission exécutive fédérale téléphonique pour tâcher d'annuler la précédente CE, où la tendance Cohen a été mise en minorité et obligée de reporter la date de signature en janvier.
Une bonne partie de la base syndicale ne veut pas de l'accord et souhaite dans l'immédiat reporter le plus tard possible la date de la consultation, afin d'avoir le temps d'informer correctement le personnel.
Tout dépendra en définitive de la mobilisation du personnel, qui devra lutter non seulement pour imposer ses vues à ses propres dirigeants syndicaux mais, surtout, aux directions d'EDF-GDF et au gouvernement.