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Dans les entreprises
ALCATEL : Suppressions d'emplois... pour augmenter les profits
Dans le cadre de l'annonce par le PDG Tchuruk de la suppression de 19 000 emplois dans l'ensemble du groupe durant l'année 2003, faisant passer les effectifs de 110 000 personnes en 2000 à 60 000 fin 2003, la direction d'Alcatel CIT (la principale filiale française d'Alcatel) a décidé de supprimer 1067 emplois en 2003 après en avoir supprimé plus de 1000 en 2002.
La direction a essayé de nous convaincre de la nécessité de ces suppressions, dans son journal intitulé Illico. Mais il semble qu'elle se prenne les pieds dans le tapis en essayant de justifier cette décision. Elle écrit, en page 2 : " La croissance de la demande des utilisateurs finaux, particuliers et collectivités, se poursuit au rythme de 10 à 15 % l'an , et page 4, les équipementiers se font la guerre des prix dans un marché qui se rétrécit " ! En fait, Alcatel continue de prendre des parts de marché et l'entreprise est devenue la première dans le domaine des télécoms.
Dans ce même journal interne, la direction se plaint : " Le niveau trop élevé des coûts dits fixes... correspond pour plus des deux tiers aux frais liés au personnel (salaires, charges déplacements surfaces, outils informatiques) ". Selon elle, les coûts liés aux salariés seraient de près de 66 % alors que la masse salariale ne représente que 25 % des frais. Mais pour produire il faut des hommes avec un salaire et une protection sociale, des machines, de l'informatique, des usines. Bref il faut investir pour envisager de gagner de l'argent. Quelle découverte !
La direction compte dans ses pertes le coût des restructurations. Un licenciement transactionnel lui coûte 1,2 million de francs, un congé de fin de carrière (pré-retraite maison) 1,4 million pour un licenciement transactionnel. Pour faire accepter la perte de leur emploi aux travailleurs de la Microélectronique sur le site de Nanterre, la direction paie à ceux qui le souhaitent une formation de remise à niveau pendant six mois, puis une formation diplômante de six à douze mois, puis après un retour de trois mois à l'entreprise pour trouver du travail à l'extérieur, la direction leur octroie une prime de licenciement d'environ trente-cinq mois. Sur CIT, toutes ces mesures représentent un coût de 1,3 milliard de francs pour une année !
La direction a donc choisi de " dégraisser " en y mettant le prix. Pourtant Tchuruk prévoit que la reprise sera là en 2003. Alors pourquoi faire des coupes dans les effectifs : tout cet argent qu'il a provisionné pour les restructurations devrait plutôt servir à maintenir les emplois !
Dans un livre de 202 pages, la direction explique les raisons des suppressions d'emplois par branche d'activité. Un argument revient sans cesse : " Il faut répartir la recherche et le développement entre les centres de développement majeurs en Europe et aux USA et des centres de développement à bas coût et accroître progressivement cette part ". Ces centres " à bas coût " sont en Chine avec l'usine de Shanghai Bell pour la fabrication, en Inde et en Roumanie pour le développement de logiciels, et des unités locales pour l'ingénierie et les installations de matériel en Roumanie, en Egypte, en Malaisie, en Pologne et en Inde.
Tchuruk veut pouvoir rebondir lors du redémarrage des télécoms, mais il prévoit ce redémarrage sans les salariés européens, en surexploitant les salariés dans les pays à faible coût de main-d'oeuvre.
Que la direction répartisse sa production sur l'ensemble de la planète, c'est son problème, mais que cela se fasse sur notre dos est une autre paire de manches. Les débrayages qui ont lieu, tant en province qu'en région parisienne, montrent que les travailleurs n'ont pas envie d'être " la version col blanc des Moulinex ". Même si la direction met le prix pour s'acheter la paix sociale et même s'il n'y a aucune comparaison entre les maigres indemnités supplémentaires qu'ont eues les ouvrières de Moulinex et les sommes que distribue la direction d'Alcatel pour supprimer les emplois.
Le fait qu'elle prévoit d'amortir en deux ans maximum ces sommes destinées à " dégraisser " montre que son seul objectif est d'accroître encore ses profits, et qu'elle aurait tout à fait les moyens de maintenir les emplois.