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Leur société
PCF : La retraite de Robert Hue
Hue, après Jospin, rend son tablier. Il a annoncé dans une interview au quotidien Le Parisien (oubliée L'Huma) sa décision de ne pas se représenter au poste de président du parti, lors du prochain congrès du PCF qui se tiendra en avril 2003.
Cette démission, même si l'intéressé explique que ce n'en est pas une, ne s'accompagne pas d'une sérieuse explication sur les raisons du recul de son parti lors de l'élection présidentielle du printemps dernier. Il se contente de dire qu'en 1997 son parti " s'était demandé s'il fallait participer au gouvernement " (de la gauche plurielle), pour expliquer ensuite : " Sans nous (les députés du PCF) la gauche ne pouvait pas être majoritaire. Nous avons pensé qu'il fallait "y aller", que nous pourrions modifier le rapport des forces ". Et préciser : " Je me reproche aujourd'hui d'avoir sous-estimé l'ampleur des efforts nécessaires pour sortir du cadre étroit des "discussions" au sein de la gauche plurielle, pour poser les questions sur la place publique " ; tout cela est un peu court.
Faut-il rappeler que cette explication est, pratiquement au mot près, celle que le même Hue donnait pour expliquer la totale impuissance des quatre ministres communistes dans le gouvernement dirigé par le socialiste Mauroy de 1981 à 1984 ?
Avant que la direction du PCF ne décide, en 1997, de signer un nouveau bail avec le PS, Hue répétait, de meeting en meeting, qu'il " ne fallait pas répéter ce qui avait échoué ". Cela n'empêcha pas son parti de faire volte-face et de s'embarquer derrière Jospin, pour y jouer une nouvelle fois le rôle de défenseur zélé de la politique du gouvernement. Car le PCF ne s'est pas contenté de sous-estimer le rapport des forces au sein de la gauche plurielle, il a mis sa force militante - certes amoindrie, mais réelle, en particulier dans les milieux populaires -, à la disposition du PS, pour y défendre l'indéfendable en prétendant que ce gouvernement défendait les intérêts des exploités.
Souvenons-nous de ces discours pour expliquer aux salariés que la loi Aubry constituait une avancée considérable des droits du monde du travail, ou de cette argumentation spécieuse pour expliquer que l'ouverture du capital d'Air France n'avait rien à voir avec la privatisation. Sans parler - mais cela se situait après le premier tour de la présidentielle - de cette mystification consistant à présenter Chirac comme le rempart des libertés. Nombre de militants du PCF se sont usés à justifier l'injustifiable.
Hue n'est pas responsable de l'évolution de son parti, même s'il l'a incarnée ces dernières années. Celle-ci est bien plus ancienne. Malheureusement, il y a tout lieu de craindre qu'elle ne s'arrête pas avec le retrait de Hue de la direction du PCF. Ce parti s'apprête, une nouvelle fois, à s'engager dans cette voie qui " a échoué " pour la bonne raison qu'il reste un parti dont la direction se fixe comme ambition d'être un parti de gouvernement. Or gouverner, c'est postuler à gérer les affaires du système en place, lui-même dominé par les industriels et les banquiers.
L'avenir du monde du travail ne se joue pas au travers du rapport des forces entre le PS et les autres forces de gauche, évalué sur le terrain électoral, mais dans le rapport des forces établi sur le plan social. Et cela, les dirigeants du PCF ne l'ont pas seulement sous-estimé. Ils l'ont tout simplement gommé de leurs raisonnements.
Aujourd'hui, Hue se déclare contre le projet d'un grand parti de la gauche, rassemblant toutes les composantes de l'ex-gauche plurielle, et explique que ce serait se mettre à la remorque du PS. C'est sans doute vrai, sur la base des données actuelles. Mais il y a plusieurs façons de s'aligner, et une seule qui permette de ne pas le faire. Ce serait de redevenir le parti de classe que le PCF voulait devenir, à son origine. Il y a bien longtemps qu'il se défend de l'être. Pourtant, s'il y a une leçon à tirer du passé récent, c'est bien celle-là.