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Dans les entreprises
Mines de Potasse : Deux mois après, cela brûle toujours !
Depuis le 10 septembre, un incendie ravage toujours le site souterrain de déchets industriels Stocamine à Wittelsheim. Plus de deux mois après le début du sinistre, on ne sait toujours pas ce qui brûle.
La direction de l'entreprise, qui n'avait prévu aucun système de sécurité et de surveillance et qui devait enfouir des produits toxiques comme du cyanure, de l'amiante ou de l'arsenic, mais ininflammables, se déclare incapable de dire pourquoi il y a incendie, ce qui est enfoui et ne veut pas révéler les noms des sociétés qui lui ont livré les déchets, se cachant derrière le secret commercial. La préfecture, qui avait garanti le système de sécurité à Stocamine, ne veut évidemment pas remettre en cause ce secret. Aussi l'enquête qu'elle a diligentée n'avance pas. De plus, le système d'aérage des galeries où sont enfouis les déchets étant en contact avec les galeries des mines de potasse d'Alsace (MDPA), la direction de celle-ci a décidé de fermer définitivement les mines quelques mois avant l'échéance prévue en mai 2003. L'exploitation des mines de potasse est donc arrêtée.
Ce n'est pas par souci de la santé des mineurs, que la direction a pris cette décision, mais parce que ceux-ci, réunis régulièrement depuis le début de l'incendie à près de 500 en assemblées générales hebdomadaires, ont refusé de descendre tant qu'on ne connaîtrait pas toute la vérité sur les produits qui brûlent. Dans un premier temps, après avoir garanti qu'il n'y avait aucune communication possible entre les systèmes d'aérage des galeries de Stocamine et celles des MDPA, les directions de ces deux sociétés avaient tenté de minimiser le danger, en affirmant qu'il ne s'agissait que d'un feu de palettes. La direction des MDPA avait alors envoyé des mineurs au contact du feu sans aucune protection. Certains de ces derniers ont ainsi subi des lésions cutanées.
Les premières analyses des fumées de l'incendie publiées par la presse se voulaient également rassurantes. Or aujourd'hui il paraît évident qu'il y a un stockage illicite de déchets. Le silence des directions, des autorités et la lenteur de l'enquête sur les causes de l'accident sont parlants par eux-mêmes. De plus, la direction des MDPA a refusé la proposition de la CGT que le CHS-CT (Comité d'hygiène et sécurité et conditions de travail) de l'entreprise ait son propre expert choisi par les syndicats. Et la presse vient de révéler que les fumées seraient cancérigènes, des analyses y ayant décelé notamment du benzène et des dioxines.
Devant le mécontentement des mineurs et l'inquiétude de la population, la direction des MDPA a tenté de désamorcer le problème en garantissant aux mineurs, bien qu'ils ne travaillent pas, salaire complet et emploi garanti pour les plus jeunes, pour l'avenir. En effet, pour le moment, les premiers salaires versés pendant que les mineurs sont à la maison sont entiers, à l'exception de la prime de transport ; mais la prime de panier y est. Malgré tout, 700 mineurs et salariés des entreprises sous-traitantes, méfiants, ont répondu présent à l'appel des syndicats pour une manifestation le 28 octobre où ils ont exigé que personne, ni les mineurs, ni les employés des entreprises sous-traitantes, ni les habitants, ne subisse les conséquences de l'irresponsabilité des directions des mines, de Stocamine et des pouvoirs publics, que ce soit sur le salaire, l'emploi ou la santé.
Mercredi 13 et vendredi 15 novembre, la direction des mines devrait présenter aux syndicats ses propositions quant à l'avenir des mineurs, leur salaire et leur santé. Des fuites laissent entendre qu'elle ne garantirait les retraites anticipées, qu'elle a officieusement promises dès 42 ans, qu'à hauteur de 80 % du salaire et d'autre part qu'elle ne se considérerait pas engagée par les problèmes de santé, dont la responsabilité reviendrait selon elle à Stocamine. Si tel était le sens des propositions de la direction, il est sûr que la colère des mineurs pourrait bien éclater, eux qui ressentent à juste titre qu'on leur a volé peut-être leur santé et qu'on pourrait en plus leur prendre une partie de leur salaire, alors qu'ils ne sont pour rien dans l'incendie et en sont au contraire les victimes.