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- Lutte ouvrière n°1785
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Editorial
La montée de la barbarie et ses responsables
On ne peut qu'être horrifié par le carnage de l'île de Bali, qui a fait 187 morts et des centaines de blessés. Quels qu'en soient les auteurs, rien n'excuse ou ne justifie cet acte terroriste, aveugle et odieux.
Les commentateurs rappellent avec nostalgie que cette île lointaine passait pour un véritable paradis. Paradis peut-être, mais pour touristes argentés seulement. Car l'archipel indonésien auquel elle appartient est une des régions pauvres de la planète dont la population vit dans la misère.
Eh oui, il n'y a plus de paradis, fût-il factice, à l'abri sur cette planète ! Mais comment pourrait-il y en avoir ?
Bien sûr, il suffit de quelques individus dépourvus de conscience et d'humanité pour perpétrer un attentat à la voiture piégée, comme celui perpétré à Bali. Mais pourquoi la multiplication des attentats ? Pourquoi la multiplication des guerres locales, des affrontements ethniques ? Pourquoi cette barbarie que l'on sent monter un peu partout sur la planète, en même temps que monte le désespoir ?
Poser ces questions, c'est en poser d'autres. Pourquoi l'aggravation de la misère dans la majeure partie de la planète ? Pourquoi, alors que la capacité productive de l'humanité s'accroît, que progressent les sciences et les technologies, plusieurs centaines de millions de personnes sont-elles condamnées à la faim, privées même d'eau potable et menacées de mourir de maladies que l'on peut guérir facilement ?
Pourquoi la croissance économique elle-même ne résorbe-t-elle pas la pauvreté ? Pourquoi, au lieu d'atténuer les inégalités, les aggrave-t-elle au contraire ? Les richesses s'accumulent au profit de quelques milliers de groupes industriels et financiers. Leurs propriétaires et les gros actionnaires ont des fortunes individuelles dont certaines dépassent les revenus nationaux de pays entiers ! Et les États des quelques grands pays impérialistes, les États-Unis mais aussi la France ou la Grande-Bretagne et quelques autres, dont la bourgeoisie concentre ces richesses entre ses mains, imposent leur ordre et leur domination au monde entier, suscitant des haines, des colères qui peuvent être capitalisées par toutes sortes de fanatismes.
Oui, le carnage de Bali est odieux. Mais celui dont Bush menace en ce moment-même l'Irak le sera bien plus encore. Car Bush n'utilisera pas les méthodes artisanales de l'attentat de Bali, mais les moyens les plus sophistiqués de la technique moderne : des missiles ou des bombes guidées par des satellites. Combien de civils, combien d'enfants mourront sous les bombes si Bush déclenche sa guerre, avec le soutien de Blair et de Chirac ? Combien sont déjà morts simplement de malnutrition à cause de l'embargo que les puissances occidentales imposent à ce pays ?
Et combien d'autres morts, victimes du terrorisme d'État d'Israël avec le soutien des puissances occidentales, dans les rangs du peuple palestinien ?
Et si l'armée française intervient plus ouvertement en Côte-d'Ivoire, combien de morts s'ajouteront à ceux de la violence ethnique, manipulée par le régime de ce pays soutenu par le gouvernement français ?
La domination de la bourgeoisie sur l'économie se traduit, même ici, dans un des pays considérés comme les plus riches de la planète, par des inégalités croissantes, par l'appauvrissement des classes populaires, par le démantèlement de tout ce qui, dans cette économie basée sur le profit individuel, sert quand même un peu la collectivité.
Mais la misère est infiniment plus grande dans les classes populaires de la partie pauvre de la planète. Voilà ce qui alimente la haine contre l'Occident riche. Et voilà ce qui alimente les repliements religieux ou ethniques
Et les bombes qu'on enverra sur l'Irak ne pourront qu'attiser un peu plus le désespoir et la haine.
A la barbarie à laquelle la bourgeoisie impérialiste conduit l'humanité, il n'y a nul échappatoire. Sauf à mettre fin à la domination de la bourgeoisie sur le monde et au système dément dont elle se nourrit.