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Leur société
Fillon : Au bon plaisir du patronat
Mercredi 18 septembre le gouvernement a adopté le projet de loi, présenté par François Fillon, le ministre des Affaires sociales, qui à travers la remise en cause de la loi de 35 heures est une véritable attaque contre les conditions d'emploi et de rémunérations de millions de salariés. L'augmentation considérable du contingent d'heures supplémentaires obligatoires pour les salariés, qui va passer de 130 à 180 heures par an, permettra une plus grande flexibilité que celle déjà existante, et elle s'accompagne d'une diminution de la rémunération des heures supplémentaires en ramenant, sous certaines conditions, la majoration de 25 à 10 % entre 35 et 39 heures. Comme le disait Maryse Dumas, secrétaire nationale de la CGT, les travailleurs vont être obligés de travailler plus pour gagner moins. Pendant le même temps le patronat bénéficiera de milliards en cadeau par le biais d'allégements de charges sociales supplémentaires.
Mais Fillon a annoncé que le gouvernement ne comptait pas en rester là, et il s'est dit " tout à fait décidé à suspendre " pour une durée d'un an et demi au minimum certains articles de la loi dite de " modernisation sociale " votée sous le gouvernement Jospin. " On a voulu rendre le licenciement le plus difficile possible, au mépris des réalités économiques. " a-t-il déclaré sur LCI. C'est une très grossière exagération, mais il s'agit pour le ministre de donner le ton, en tenant à chaque occasion un discours antiouvrier et pro-patronal.
Cette loi qui devait prétendument " améliorer la protection des salariés " face au danger des licenciements s'est limitée à quelques mesures de procédure qui n'ont rien changé aux fournées de licenciements à répétition. Elle avait été en réalité un simple effet d'annonce il y a un an, face à l'émotion soulevée dans la population laborieuse par la multitude de plans de licenciements, que ce soit chez Danone, Moulinex, et face à la passivité du gouvernement de la gauche plurielle qui s'était contenté de condoléances vis-à-vis de salariés, au mieux de déclarations d'intention sur des reclassements à venir qui, on l'a vu pour les salariés, et tout particulièrement pour ceux de Moulinex, étaient des mensonges.
Pour le moment la seule mesure que Fillon ne prévoit pas de suspendre dans cette loi est le doublement de l'indemnité légale de licenciement qui a fait passer celle-ci d'un dixième de mois par année d'ancienneté au-delà de deux ans d'ancienneté, à un cinquième de mois, conformément à ce que garantit la plupart des conventions collectives comme celles de la Métallurgie par exemple. Il est vrai que ce serait un geste tellement dirigé de façon ostentatoire contre la " France d'en bas " que le gouvernement ne voudrait pas la prendre trop vite. Mais quand Fillon critique avec gourmandise les réelles limites et les insuffisances de la loi de l'ancien gouvernement de la gauche dite plurielle, il propose lui de ne rien faire et de s'en remettre à la seule volonté patronale. Ce que le gouvernement avance c'est de rendre encore plus faciles les licenciements, plus souple l'accomplissement des plans dits sociaux, au nom de la réalité économique telle que la conçoivent les patrons.
Et l'attitude du gouvernement apparaît d'autant plus provocante que la situation de l'emploi ne cesse de se détériorer avec le chômage qui s'aggrave partout. Du nord au sud de la France les plans de suppressions d'emplois continuent d'être inexorablement annoncés. Dans certains départements comme l'Eure le chômage a augmenté de 13, 3 % en un an.
On voit où mène le plébiscite en faveur de Chirac, cette droite arrogante se croit tout permis. Fillon a annoncé d'ailleurs qu'à travers " le dialogue social ", qui est le mot fourre-tout à la mode actuellement, le patronat pouvait espérer d'autres cadeaux et d'autres remises en cause des quelques droits dont bénéficiaient les travailleurs. Et plus que l'effet direct des mesures annoncées, ce qui est le plus immédiatement néfaste dans ce contexte c'est que cela représente un formidable encouragement pour l'ensemble du patronat pour s'attaquer sans délai et très concrètement, avec les méthodes qu'on lui connaît, aux conditions de travail, aux salaires et à l'emploi des travailleurs de ce pays.
La seule chose qu'on peut espérer c'est que les hommes du patronat, dans les entreprises comme au gouvernement, recevront le plus tôt possible la réponse qu'ils méritent : la riposte d'ensemble du monde du travail déterminé à arracher ce qui lui est dû.