Continental (Oise) : L'acharnement patronal contre un délégué13/09/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/09/une1780.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Continental (Oise) : L'acharnement patronal contre un délégué

Vendredi 6 septembre, plus de 350 salariés se sont rassemblés devant l'usine de pneus Continental de Clairoix, près de Compiègne (Oise), pour protester contre le licenciement d'un délégué syndical CGT, connu par ailleurs pour son engagement à Lutte Ouvrière. Il y avait des travailleurs de Continental, pour plus de la moitié, ainsi que des travailleurs des autres usines de la région, venus apporter leur soutien, à l'appel de l'Union locale, de l'Union départementale CGT et de la Fédération de la Chimie CGT.

L'avant-veille, une assemblée générale s'était tenue dans l'usine avec plus de 150 ouvriers, ce qui n'est pas si fréquent dans cette usine de 1 200 salariés, dont 800 travailleurs en production.

La direction a licencié ce délégué pour avoir participé à une grève, il y a huit ans, en juin-juillet 1994, aux côtés des centaines d'autres ouvriers. Elle n'a jamais pardonné cette grève, et surtout elle cherche, de cette façon, à s'attaquer à tous les salariés de l'usine.

Cette grève était plus que légitime puisqu'elle avait éclaté contre la tentative de faire passer la semaine de travail à 45 heures durant les mois d'été, en revendiquant une augmentation de salaires et l'embauche des intérimaires. Elle eut un écho dans les autres entreprises de la région, d'abord parce que ces revendications étaient aussi celles de bien d'autres travailleurs, mais aussi parce que la direction de l'usine avait fait envoyer des nervis pour faire le coup de poing contre les grévistes. Elle avait été condamnée en justice pour cela.

Mais ce patron aux méthodes de voyou continua à s'attaquer aux grévistes dans les mois qui suivirent la fin du conflit, cette fois en tentant de licencier les plus combatifs des grévistes. Finalement, quelques mois plus tard, la demande de licenciement n'était maintenue que contre ce délégué.

Au bout de huit ans de procédure, durant lesquels ce délégué fut d'abord licencié sur décision du ministre du Travail de l'époque, puis réintégré au bout d'un an, la direction a fini par obtenir du Conseil d'État une décision qui lui est favorable. Celui-ci a jugé que le ministre du Travail avait raison. Mais, contrairement à ce que la direction a martelé tous ces derniers jours, la décision du Conseil d'État n'est absolument pas une " obligation " de licencier. C'est elle seule qui a décidé du licenciement. D'ailleurs, elle était tellement pressée qu'elle a envoyé sa lettre de licenciement deux jours avant la notification du Conseil d'État...

L'indignation devant ce licenciement s'exprime de plus en plus. Une pétition pour la réintégration de notre camarade et le respect des droits de tous les travailleurs circule depuis mi-juillet et a déjà été signée par la majorité du personnel. L'agitation dans l'usine commence à faire sortir la direction de ses gonds car les discussions se multiplient à de nombreuses occasions, par petits groupes. Les plus anciens racontent la grève de 1994 aux plus jeunes. On commence à entendre des ouvriers dire que " si un gars comme ça se fait licencier, on risque d'y passer aussi ". Et la production... s'en ressent.

Mercredi 4 septembre, les chefs ont eu beau tourner toute la matinée, plus de 150 travailleurs se réunirent. En assemblée, durant plus d'une demi-heure, pour appuyer les délégués qui allaient affirmer, au Comité d'entreprise extraordinaire, la nécessité de réintégrer leur camarade.

Dans les autres entreprises, la pétition est également signée largement, et de nombreux travailleurs et militants syndicaux d'autres usines se sont déplacés au rassemblement du 6 septembre.

Ce licenciement est compris, à juste titre, comme une attaque contre le droit de revendiquer, de faire grève, contre le droit des travailleurs d'avoir les représentants qu'ils ont élus. Et, surtout pour les travailleurs de Continental, il devient de plus en plus clair que la direction veut serrer la vis à tous. Et elle fait quotidiennement des tentatives dans ce sens : elle menace les intérimaires, elle tente d'obtenir des heures supplémentaires. Elle essaie de faire la chasse aux temps de pause, en installant un système de mouchardage sur les machines.

Mais la direction craint aussi que le climat ne se retourne contre elle. Des travailleurs ont tenu à dire durant le rassemblement du 6 septembre qui fallait aller jusqu'au bout. Ce n'est, pour eux, que le début du bras de fer qui s'est engagé contre le patron de Continental.

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