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Espagne : Une précarité qu'Aznar veut encore aggraver
En Espagne, le travail précaire ne cesse de se développer. C'est vrai dans le secteur agricole, en particulier dans la région d'Almeria ou de Murcie dans le sud du pays, où une main-d'oeuvre souvent immigrée subit des conditions de travail et de vie très difficiles. C'est vrai aussi dans les zones côtières où se sont développés des grands complexes touristiques qui surexploitent une main-d'oeuvre d'origine espagnole, marocaine et sud-américaine. Et à la fin de la récolte ou de la haute saison touristique, c'est le chômage, peu ou pas indemnisé, ce qui signifie des conditions de survie misérables.
Le Bâtiment, dominé par des grandes entreprises comme Dragados, Ferrovial ou Fomento, est un secteur où les travailleurs ne peuvent se faire embaucher que par des entreprises sous-traitantes qui drainent, à partir des régions les plus pauvres, une main-d'oeuvre qui va de chantier en chantier, au hasard des marchés de leurs employeurs, qui sont bien souvent de véritables négriers contre lesquels les salariés n'ont aucun recours.
Gecisa, une filiale de Dragados, spécialisée dans la restauration des monuments historiques, des ponts, des cathédrales et des châteaux, utilise les services de multiples sous-traitants qu'elle met en concurrence les uns avec les autres, pour la plus grande précarité des travailleurs.
Tous les dimanches soir, par exemple, partent vers deux heures du matin, d'Andujar, un bourg de la province de Jaen, des fourgonnettes pleines d'ouvriers qui doivent se rendre à Pamplune, Murcie ou Valladolid, c'est-à-dire à quatre ou cinq cents kilomètres de là. Au terme du voyage les travailleurs commenceront vers 8 heures du matin leur première journée de travail qui se terminera 11 ou 12 heures plus tard. Ils resteront là jusqu'à la fin de la semaine, ou plus, ou moins ! Les contrats de travail sont différents les uns des autres, confus dans les termes et laissent le travailleur sans protection et sans défense.
Certains travailleurs sont payés à la journée, pour un horaire hebdomadaire oscillant entre 52 et 56 heures. D'autres sont payés à l'heure ce qui permet à l'employeur de déduire de la paie toute heure non travaillée quelle qu'en soit la cause. Le salaire horaire varie entre environ 45 et 55 francs de l'heure, tout compris, c'est-à-dire en incluant les heures supplémentaires, les vacances, les indemnités de licenciement, etc.
Ce qui se passe à Andujar se passe dans des centaines de bourgs, de villages ou de quartiers pauvres d'Espagne. Or c'est cette précarité déjà insupportable que le gouvernement Aznar veut aggraver. L'on comprend alors pourquoi sa réforme concernant la législation sur le chômage a soulevé indignation et protestations dans les campagnes comme dans les villes.