- Accueil
- Lutte ouvrière n°1771
- Sommet du G8 : L'Afrique reléguée au second plan
Dans le monde
Sommet du G8 : L'Afrique reléguée au second plan
Le dernier sommet du G8, le groupe des huit pays les plus puissants, qui s'est tenu au Canada, devait être en priorité consacré à l'Afrique. Quatre chefs d'États africains (Afrique du Sud, Algérie, Nigéria, Sénégal) avaient été invités pour la première fois pour plaider en faveur du NEPAD : le " Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique "... projet qui, selon ceux qui l'ont conçu, devrait coûter 64 milliards de dollars d'investissements par an.
En fait, les problèmes de l'Afrique n'ont guère été au centre des débats. Ils ont été éclipsés par ceux de la lutte contre le terrorisme et du conflit au Proche-Orient. Les chefs de file de l'impérialisme ont décidé de consacrer " 20 milliards de dollars " à la lutte contre la menace nucléaire, bactériologique et chimique et pour le développement de l'Afrique, et ont tout juste consenti une petite réduction de la dette d'un milliard de dollars... aux pays les plus endettés, notamment ceux touchés par la baisse des cours des matières premières. Une somme dérisoire au regard de l'endettement des pays du continent africain !
Pour le reste, ce ne fut que déclarations d'intentions comme à chaque fois. La décision de consacrer à l'Afrique la moitié de l'augmentation de l'aide publique au développement (ADP) n'a été assortie d'aucun engagement contraignant. Les pays européens ont décidé d'augmenter leur aide publique pour tous les pays y compris l'Afrique d'ici 2006. Elle correspond actuellement à 0,33 % de leur richesse nationale et devrait passer à 0,39 %. Celle des États-Unis s'élève à 0,1 % de son produit intérieur brut. Certes, jusqu'à présent cette aide était en baisse régulière. Mais la hausse prévue - si elle est effective - est loin de compenser la baisse de ces dernières années. Dans tous les cas, l'aide publique au développement est dérisoire au regard des besoins immédiats et urgents en matière de santé et d'éducation des pays africains et du Tiers- Monde. L'ADP ne profite guère à la majorité de la population pauvre qui en aurait le plus grand besoin. Et dernier paradoxe : elle se " dirige " vers les pays jugés " intéressants " à l'aune des intérêts économiques et politiques de l'impérialisme, cette Afrique qualifié " d'utile " par les experts des organismes internationaux. Cette " Afrique "-là est celle, en général, des pays producteurs de pétrole et autres richesses minières, qui permet aux multinationales de réaliser des profits considérables.
Les bourgeoisies nationales de ces pays détournent l'aide publique pour leur compte, quand ce ne sont pas les multinationales, elles-mêmes, en complicité directe avec leur propre impérialisme, qui utilisent cette manne pour corrompre les élites locales : chefs d'États, ministres ou généraux et en faire des instruments dévoués à leurs intérêts. Alors le préalable de " bonne gouvernance " et de lutte contre la corruption imposé aux pays africains par le G8 pour que ces derniers puissent prétendre à l'aide publique à venir est d'une totale hypocrisie ! Comme le disait en substance un dictateur africain, Omar Bongo, un " ami de la France " connaisseur en la matière : " Pour qu'il y ait un corrompu, il faut bien un corrupteur ".
L'Afrique est délaissée par les grandes puissances qui n'y investissent que ce qui est nécessaire à la réalisation de leurs profits. Elle n'intéresse les multinationales que dans la mesure où celles-ci peuvent piller ses richesses. Peu importe si la moitié de la population du continent vit avec moins de un dollar par jour et n'a accès ni à l'eau potable et à l'électricité, ni aux soins et à l'éducation.
La dure réalité, c'est le pillage du pétrole d'Afrique de l'Ouest et Equatoriale par les compagnies pétrolières occidentales et américaines, des richesses minières de la République démocratique du Congo, un pays aujourd'hui totalement démantelé et dépecé. La spéculation à la Bourse de New York, de Londres ou de Paris sur les matières premières agricoles achève de ruiner les petits planteurs de café et de cacao ivoiriens. Tandis que les subventions de l'État aux grands producteurs de coton des États-Unis réduisent à la misère les petits d'Afrique de l'Ouest qui ne peuvent lutter à armes égales.
Le FMI, invoquant la liberté des échanges et du commerce, a récemment démantelé les organismes qui négociaient en lieu et place des petits producteurs africains sur le marché mondial. Ceux-ci doivent directement faire face à un marché qui détermine les prix sans qu'ils aient la possibilité de faire le poids. Dans ces conditions, la ruine est assurée. Plusieurs millions d'Africains de l'Ouest, vivant de la culture du coton voient ainsi leur niveau de vie directement menacé par la spéculation dans les pays riches. Il ne faut pas chercher plus loin les raisons du sous-développement et de la pauvreté dans lesquels s'enfonce un peu plus l'Afrique.