Les capitalistes contents de l'épargne salariale...28/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1770.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Leur société

Les capitalistes contents de l'épargne salariale...

Il y a plus d'un an, était votée une loi proposée par Fabius, la loi du 19 février 2001, élargissant les possibilités de l'épargne salariale. Au bout d'une année d'application, une enquête a été faite par des filiales de banques, spécialisées dans la gestion de cette épargne salariale. Elle tire la conclusion que les capitalistes sont contents de cette loi, et pour cause.

Cela fait longtemps qu'ils essaient de drainer vers eux les économies de millions de salariés par le biais de cette épargne salariale. Celle-ci peut prendre différentes formes, l'intéressement des salariés à l'entreprise, les plans d'épargne d'entreprise, l'actionnariat salarié et les options de souscriptions ou d'achats d'actions. La loi Fabius a permis d'étendre encore les possibilités d'épargne salariale aux petites et moyennes entreprises, de simplifier des mécanismes existants, et de créer un plan d'épargne à long terme, le plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV).

Avec ce PPESV, le salarié fait mensuellement un versement. La somme est bloquée pendant au moins dix ans. L'entreprise peut également, de son côté, participer aux versements, c'est " l'abondement ". On comprend vite que les capitalistes soient très satisfaits de ce PPESV quand on sait que ces versements patronaux sont déductibles de l'impôt sur les bénéfices, qu'ils ne sont pas soumis aux cotisations sociales, et qu'ils peuvent constituer une " provision pour investissement ", et à ce titre permettre une dispense d'impôts pouvant aller de 25 % de l'abondement jusqu'à même 50 %. L'enquête réalisée par le " Baromètre annuel de la gestion de l'épargne salariale " tire une conclusion édifiante : " L'épargne salariale permet avant tout aux entreprises de mettre en place et de maintenir une politique de rémunération globale et motivante. Dans le contexte de réduction des coûts, cet outil est une composante particulièrement pertinente de la politique de rémunération globale, permettant d'accroître les avantages accordés aux salariés tout en optimisant le traitement fiscal et social ".

Mais surtout cet argent, constitué des économies de millions de salariés, permet aux banques ou aux grandes compagnies d'assurance, qui le gèrent par l'intermédiaire de filiales, de faire des " placements financiers ", autrement dit de spéculer, et de tirer bien sûr de gros profits de cette spéculation. Six grands groupes contrôlent 74 % des fonds communs de placement d'entreprise (FCPE) sur lesquels sont placées les épargnes salariales : ce sont la Banque populaire, la Société Générale, la BNP, Axa Gestion, le Crédit Lyonnais, le Crédit Agricole et le CCF. Des milliards d'euros sont ainsi drainés des poches des salariés à celles des capitalistes, banquiers ou assureurs.

Ces plans d'épargne à long terme fonctionnent en fait selon le même principe que les fonds de pension. Mais après un certain nombre d'affaires, dont la faillite d'Enron aux Etats-Unis, où des milliers de salariés ont perdu, en même temps que leur travail, les économies placées dans ces fonds pour leur retraite, les fonds de pension n'ont pas très bonne presse. Capitalistes et gouvernement essayent donc de rassurer les salariés et de les convaincre que, contrairement aux salariés d'Enron, ils ne risquent pas de tout perdre au bout de dix ans. D'où la mise en place en France d'un " Comité intersyndical de l'épargne syndical " (le CIES) qui est censé surveiller les fonds de placement, et qui délivre un " label " pour les offres d'épargne salariale.

La loi Fabius a étendu le pouvoir de ce comité de " surveillance " qui est composé de représentants syndicaux, deux par syndicat. Ceux-ci cautionnent donc par ce biais ce système de retraite par capitalisation qui est un racket sur les économies de salariés. Mais cela ne donne aucune garantie aux salariés, car les syndicats n'ont évidemment aucun moyen de contrôler réellement ces fonds de placement qui sont tout sauf transparents.

Cette épargne salariale est donc un moyen d'assouvir encore la soif de profits des capitalistes et leur permet de faire main basse sur les économies de millions de salariés.

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