La grève générale : Une réponse des travailleurs à la réforme d'Aznar28/06/20022002Journal/medias/journalnumero/images/2002/06/une1770.jpg.445x577_q85_box-0%2C104%2C1383%2C1896_crop_detail.jpg

Dans le monde

La grève générale : Une réponse des travailleurs à la réforme d'Aznar

Le 20 juin, c'est en répondant massivement aux appels à la grève générale et aux manifestations que les travailleurs d'Espagne ont montré leur refus de la réforme concernant la législation sur le chômage.

Ce sont, dans tout le pays, des millions de travailleurs qui ont cessé le travail, en particulier dans l'industrie, la construction et les transports ainsi que dans les services, et dans une moindre mesure dans le petit commerce. Dans les principales villes, mais aussi dans bien des villages, l'activité s'était arrêtée comme si c'était un dimanche. La consommation d'électricité correspondait à celle d'un jour férié. Les grandes entreprises des zones industrielles ont été paralysées et la plupart des manifestations ont été imposantes. Les forces de police parlent de 400 000 manifestants à Barcelone, les syndicats de 500 000 à Madrid, 150 000 à Vigo et plus de 100 000 à Séville.

Le gouvernement avait tout fait pour limiter l'ampleur de cette journée de grève générale. Il a tenté d'imposer un service minimum susceptible d'assurer entre 50 et 40 % de l'activité, comme par exemple dans les transports. Mais les travailleurs ne se sont pas laissé impressionner. En Andalousie les services minimums n'ont pas été appliqués. Dans les transports, à Séville par exemple, aucun des 70 autobus prévus par la société de transports urbains, la Tussam, n'a fonctionné.

Partout le patronat et le gouvernement y sont allés de leurs menaces vis-à-vis des grévistes. Les pressions policières et patronales ont été importantes à l'égard des piquets de grève. On sait aussi que des jeunes ont été licenciés dès le lendemain de la grève. Mais la colère contre l'attaque grave que représente la réforme s'est manifestée par le succès du mouvement.

La nouvelle législation que le gouvernement veut mettre en place rapidement est une attaque ouverte contre les travailleurs de l'ensemble de l'Espagne. Elle est destinée à aggraver le chômage et à diminuer encore davantage les droits, déjà bien maigres, de ceux qui perdent leur emploi. Le gouvernement voudrait que les chômeurs en soient réduits à accepter n'importe quel travail dans un rayon de 30 km autour de leur domicile, faute de quoi ils perdraient tous leurs droits et allocations, pourtant déjà bien insuffisantes pour vivre. Le patronat espère que cette pression lui permettra d'imposer davantage de contrats précaires ainsi qu'une plus grande flexibilité. La réforme prévoit que, tant que la justice n'aura pas statué, un licencié estimant son licenciement abusif ne pourra plus prétendre toucher ni salaire ni allocation. C'est dire que licencier coûtera encore moins cher au patronat.

Les conséquences de cette réforme seraient dramatiques pour les classes populaires, aussi bien dans les villes que dans les campagnes. Et c'est déjà par centaines de milliers que des paysans pauvres, des habitants des petites villes et des villages d'Andalousie étaient venus à Séville, par exemple, pour manifester et protester contre les plans du gouvernement.

Cette réforme qui se traduirait, si elle était appliquée, par l'appauvrissement de toute une partie de la population et de la jeunesse doit être abolie. Une seule journée de grève générale, même réussie, ne peut suffire pour obliger le patronat et le gouvernement à revenir en arrière. Et l'un des problèmes est bien que, face à un patronat et à un gouvernement décidés et offensifs, les syndicats officiels (Commissions Ouvrières et UGT) tout comme les partis de gauche, le PSOE et IU (la Gauche Unie) ont surtout mis en avant leur volonté de voir " le dialogue social " se renouer entre les partenaires sociaux, dénonçant de façon bien modérée l'" aveuglement du gouvernement " et préconisant le retour à la " voie démocratique ", comme si cette réforme pouvait être négociée et amendée.

Le succès de la grève générale a montré la force de la classe ouvrière dans la société. Elle ne doit pas rester sans lendemain ni déboucher sur des actions symboliques destinées à appuyer des négociations de détail. Seuls des mouvements déterminés, convergents et débouchant sur une lutte de l'ensemble du monde du travail obligeront le gouvernement et le patronat d'Espagne à reculer.

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