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- Lutte ouvrière n°1757
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Diminuer la taxe d'habitation ? Mais Jospin n'est pas prêt à taxer les richesses
Jospin a inscrit à son programme la réduction de moitié de la taxe d'habitation que le Parti Socialiste considère comme l'impôt " le plus injuste et le plus absurde ".
Injuste, elle l'est en effet. Mais il y a plus injuste encore, c'est la TVA et la TIPP, la taxe sur les carburants, qui sont d'ailleurs les impôts qui constituent la part la plus importante des recettes de l'Etat. En effet un chômeur ou un salarié payent la même TVA sur le beurre et la même taxe sur le litre d'essence qu'un riche. Les impôts indirects en général frappent proportionnellement moins les riches que les pauvres. D'après une étude de l'INSEE, ceux dont les revenus sont les plus faibles dépensent en moyenne 13 % de ces revenus en impôts indirects, au lieu de 6 % pour les plus riches. Mais ni Jospin, ni Chirac, ne proposent de baisser la TVA.
Cela n'empêche pas, il est vrai, que la taxe d'habitation soit un impôt injuste. Elle est injuste dans son principe même, puisque le montant de la taxe d'habitation ne dépend pas du revenu, mais de la valeur locative estimée de l'appartement. Seules les familles les plus démunies en sont exonérées.
Mais une famille de smicards avec plusieurs enfants pourra payer nettement plus d'impôts locaux qu'un célibataire fortuné dans la même ville.
Deuxième injustice : le montant des impôts locaux peut varier considérablement d'une commune à l'autre. Effectivement, le taux d'imposition dépend des communes. Pour un même logement, il peut varier du simple au triple selon la ville. Et, plus la ville est riche, moins la taxe d'habitation est élevée. A Puteaux ou à Neuilly, où existent de nombreuses entreprises ou sièges sociaux, les ressources de la taxe professionnelle, revenant au budget local, permettent d'établir des taux d'imposition faibles pour les particuliers. A l'inverse, dans des villes comme Garges ou Sarcelles, dans la banlieue populaire de la région parisienne, les habitants subissent des taux d'imposition bien plus élevés.
La " dotation de solidarité " instituée en 1992 entre communes riches et pauvres était censée contrebalancer cette inégalité. Mais le résultat est symbolique : les villes ouvrières croulent sous les dettes et sont contraintes d'augmenter les impôts locaux, alors que les villes bourgeoises n'ont aucun de ces problèmes financiers.
C'est dire que cette taxe d'habitation, loin de corriger les inégalités, les aggrave. De ce point de vue, la disparition de la taxe d'habitation ne serait pas un mal, mais à condition de la remplacer par un impôt très progressif sur les revenus. Car la supprimer purement et simplement reviendrait à faire un cadeau à ceux qui vivent dans les résidences les plus cossues, tout comme la suppression de la vignette automobile a plus profité aux propriétaires de voitures chères et puissantes qui payaient 10 000 F de vignette qu'aux possesseurs d'un petit modèle dont la vignette coûtait quelques centaines de francs.
Or il ne s'agit pas, pour Jospin, de supprimer la taxe d'habitation, mais de la réduire de moitié... en cinq ans. Réduire de moitié une injustice, ça n'est pas la supprimer.
Jospin n'est pas prêt à prendre l'argent où il est, chez les riches ! Même en paroles !