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Leur société
On a retrouvé Didier Schuller : Le règne des copains et des coquins
Une semaine après avoir publié l'interview où le juge Halphen annonçait qu'il quittait la magistrature, Le Parisien a récidivé en donnant cette fois la parole au fils de Didier Schuller, cet ancien conseiller général RPR et ex-directeur général des HLM des Hauts-de-Seine, en cavale depuis le scandale de l'affaire des HLM des Hauts-de-Seine et de la Ville de Paris, un dossier qu'avait commencé à traiter le juge Halphen et qui éclaboussait à la fois le principal dirigeant RPR des Hauts-de-Seine, Charles Pasqua, et l'ex-maire de Paris, Jacques Chirac.
Le fils de l'ex-conseiller général prétend que c'est l'interview du juge qui a été le déclic de ces révélations. "On a eu sa peau", se serait exclamé son père en lisant l'entretien du juge. Et ce qu'on apprend de Didier Schuller n'est pas très surprenant : on se doute que les hommes politiques par qui le scandale arrive conservent assez d'appuis pour pouvoir rebondir après un scandale.
Officiellement, les autorités policières avaient "perdu sa trace" en 1998 après l'avoir localisé un temps aux Bahamas. Il vivrait maintenant à Saint-Domingue où, disposant d'un vrai-faux passeport belge, il logerait dans une résidence pour milliardaire au bord de la mer. Il serait un conseiller du dictateur local, pour lequel il aurait rédigé le "programme économique" (s'en mettre plein les poches ?). Il fréquente aussi le consul américain, ex-patron de la CIA pour la Caraïbe (les Etats-Unis gardent un oeil sur ce pays depuis des lustres, où ils sont déjà intervenus militairement dans le passé) avec qui il joue au golf. Schuller servirait même d'intermédiaire à des entreprises françaises, comme par exemple Vivendi qui ramasse les poubelles à Saint-Domingue. Ces activités et ces fréquentations assurent à Schuller un très haut niveau de vie mais également une impunité qui arrange bien tout le monde.
En effet, personne parmi les dirigeants des grands partis politiques n'a envie que Schuller revienne raconter par le menu qui profitait des largesses des industriels du bâtiment dans la gestion des HLM de Paris comme des Hauts-de-Seine. En tout cas ni Pasqua, qui a déjà assez de casseroles accrochées à ses basques, ni Chirac, qui souhaite conserver son siège présidentiel et l'impunité qui va avec. Ni les entreprises françaises à qui il sert d'intermédiaire.
Et ces protections ne datent pas d'hier. Déjà, en 1994, à l'époque de la mise à jour du système de financement des partis politiques qui se dissimulait derrière l'affaire des HLM, plusieurs manoeuvres avaient été tentées pour brouiller les pistes. En traitant à la fois l'affaire des HLM de Paris et celle des Hauts-de-Seine, le juge Halphen risquait d'y voir plus clair dans les modes de financement du RPR. Une provocation avait été alors montée par Schuller contre le juge en manipulant son beau-père, le docteur Maréchal. La manipulation avait été éventée mais le dossier judiciaire avait été scindé en deux et Halphen ne s'occupait plus que de celui des HLM de la Ville de Paris, où on devait lui mettre d'autres bâtons dans les roues. Schuller, mis sur la sellette par le demi-échec de la manoeuvre, avait choisi de s'éclipser en 1995 pour ne pas devenir le lampiste dans cette affaire.
Apparemment, il n'a pas perdu ses talents d'entremetteur et d'intermédiaire. Certains industriels français y trouvent leur compte et Schuller aussi, puisqu'il n'a plus besoin de partager ses pourboires avec le RPR.