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Les personnels de la culture dans la rue
Les personnels de la culture étaient de nouveau dans la rue le jeudi 15 novembre. Parti de l'Hôtel de Sully rue Saint-Antoine, qui abrite la Caisse nationale des monuments historiques, le cortège s'est rendu devant le ministère de la Culture au Palais-Royal. Les 2000 manifestants, agents des musées nationaux, des Monuments historiques, du Centre Pompidou, des Directions régionales des affaires culturelles... refusent toujours les conditions de la mise en place des 35 heures que veut imposer Catherine Tasca.
En effet, la ministre de la Culture, comme ses compères du gouvernement, veut profiter de l'occasion pour supprimer un certain nombre d'acquis. Dans le collimateur, la "semaine Malraux", obtenue du temps du ministre du même nom, qui n'est pourtant que la légitime compensation des contraintes horaires imposées par l'ouverture des musées les week-ends, les jours fériés, par les nocturnes et le travail en équipe et de nuit pour les agents de surveillance. Ces cinq jours de congés supplémentaires, auxquels s'ajoutent deux autres jours dits "jours du ministre", seraient, d'après la ministre une "anticipation historique du processus de réduction du temps de travail". Bref, nous faisons 35 heures depuis des années, mais nous ne le savions pas ! Un prétexte pour ne pas réduire le temps de travail hebdomadaire et passer aux 35 heures à effectifs constants, c'est-à-dire sans créations d'emplois.
Les personnels de la Culture ne sont pas d'accord. Ils l'ont déjà montré en octobre par des mouvements de grève qui ont entraîné la fermeture de la plupart des musées nationaux à Paris et des opérations "entrées gratuites". Les directeurs des musées y sont allés de leurs déclarations à la presse et à la télévision sur le manque à gagner dans les caisses des musées. Le directeur du Centre Pompidou a chiffré à 4 500 000 francs la perte occasionnée par les 21 jours de fermeture au public. Il est vrai que l'État incite de plus en plus les musées à vivre de leurs ressources propres, ce qui est un encouragement à augmenter les prix d'entrée pour le public, à limiter les entrées gratuites et à multiplier les activités rentables, même celles qui sont sans rapport avec la culture.
Ainsi, un centre culturel comme le Centre Pompidou loue ses locaux à des entreprises privées. Le restaurant du cinquième étage, qui abritait la cantine du personnel, est devenu le très chic et très cher "Chez Georges" exploité par la société Coste, et le personnel doit se débrouiller pour aller déjeuner dans les cafés alentour. La boutique "Printemps design" sert de vitrine au groupe dirigé par François Pinault. Dans le musée, Paul Ricard a placé sa publicité entre deux chefs-d'oeuvre de l'art contemporain. Et bien d'autres encore (de la Lyonnaise des Eaux à Samsung, en passant par Saint-Gobain et autres bienfaiteurs de la culture), en échange de quelques deniers, se servent de ces espaces prestigieux pour leurs colloques et leur publicité.
L'accès à l'escalator est interdit à toute personne qui n'a pas de billet d'entrée au musée, ce qui revient à faire payer 30 francs la vue sur Paris. Alors, quand le directeur du Centre s'est indigné des 21 jours de fermeture, à qui pensait-il ? Aux dizaines de milliers de visiteurs venus lire à la bibliothèque ou voir l'exposition Dubuffet et qui se sont cassé le nez ? Ou bien aux sociétés qui avaient loué des espaces et qui ont dû annuler ? Et le directeur du musée du Louvre, qui a porté plainte contre les syndicats devant le tribunal administratif et fait ordonner la levée des piquets de grève, on ne l'entend jamais protester contre le fait que, tout au long de l'année, un cinquième des salles du musée sont fermées au public, faute de personnel pour en assurer l'ouverture !
Le ministère de la Culture n'a toujours pas cédé sur l'essentiel : le maintien des acquis et l'embauche de personnel, ne serait-ce que pour résorber les emplois précaires qui se sont multipliés ces dernières années. Les personnels savent d'expérience que la culture, c'est bien le cadet des soucis des gouvernements et qu'il faudra encore se mobiliser.