Belgique : Après l'effondrement de Swissair, la Sabena mise en faillite23/11/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/11/une-1740.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Dans le monde

Belgique : Après l'effondrement de Swissair, la Sabena mise en faillite

Dans la faillite de la Sabena, la compagnie belge de transport aérien, ce sont huit à douze mille salariés (selon le nombre de filiales qui seront touchées) qui vont être balancés par-dessus bord ! Et les firmes sous-traitantes de la Sabena ou ayant un lien avec les activités de l'aéroport pourraient supprimer de dix à vingt mille emplois.

La télévision, en Belgique, a surtout montré le désarroi de pilotes et d'hôtesses de l'air, souvent des couples licenciés en même temps. Mais il y a bien plus de femmes de ménage, de mécaniciens au sol, d'ouvriers d'entretien qui ont vingt ans ou plus d'ancienneté. Que vont-ils devenir, alors que les licenciements se multiplient dans tout le pays ?

Quelques juges ont appliqué la loi, sous la pression du monde de la finance, avec la bénédiction des ministres libéraux et socialistes, et sous la protection de la police, qui fut expédiée en force à l'aéroport de Zaventem et dans le quartier du gouvernement.

C'est ainsi le personnel qui fait les frais des manoeuvres financières autour de la Sabena. Depuis 1995, le groupe helvétique Swissair possédait 49,5 % de la compagnie aérienne belge. L'Etat belge espérait se défaire de la plus grande partie du reste du capital. Un protocole allant dans ce sens avait même été signé avec Swissair. La Sabena annonçait un déficit chronique, malgré l'augmentation importante du nombre de passagers ces dernières années, malgré les baisses de revenus imposées au personnel, notamment aux pilotes. L'Etat et la presse attaquaient "l'égoïsme du personnel", qui avait réussi à limiter la réduction des effectifs et les atteintes aux salaires par plusieurs grèves dures. De son côté, l'association des pilotes dénonçait depuis des années le pompage que Swissair opérait dans les finances de la Sabena. Il s'élève aujourd'hui à 1,5 milliard d'euros, soit les deux tiers du déficit qui motive la faillite de la Sabena. Quand la presse révéla que les banques suisses avaient réussi à éviter de faire les frais de la faillite de Swissair, et en réalisant même de bonnes affaires lors du rachat de ses dépouilles à très bas prix, le point de vue des pilotes s'imposa.

Une commission parlementaire devrait enquêter sur la complaisance des administrateurs de la Sabena. Même si elle confirme ce pillage de la Sabena, cette commission n'aura ni la volonté ni la possibilité de condamner les banques suisses et leurs actionnaires à redonner un travail, ou au moins un revenu, aux milliers de salariés licenciés.

Le gouvernement a fait appel a quelques grands noms de la finance pour sauver les meubles et son image politique, en redémarrant une partie des liaisons européennes de la Sabena à partir d'une de ses filiales. Il y a notamment le comte Lippens, à la tête du groupe financier Fortis, et le vicomte Davignon, président de la Société Générale de Belgique.

Maintenant que les ministres ont supprimé la moitié des effectifs, qu'ils ont imposé des salaires écrasés de 30 à 40 % et une productivité 10 à 20 % plus élevée, la nouvelle compagnie est annoncée comme pouvant dégager des profits dès 2003. Mais ces financiers n'ont guère pris de risques, c'est l'État qui couvrirait les pertes. Bien sûr, s'il y a des bénéfices, ils iront dans la poche des financiers.

Cependant cette nouvelle compagnie réduite semble mal partie. Il y a les réticences des financiers à investir, et aussi la concurrence de Virgin, de Lufthansa, d'Air France et d'autres, qui s'installent sur les lignes abandonnées par la Sabena. Toute une partie du personnel qui n'a pas été licencié dans la première vague le serait dans une seconde.

Le personnel de la Sabena et de nombreux travailleurs d'autres entreprises ont été très choqués du refus des directions syndicales d'engager une quelconque action pour faire pression sur le gouvernement, même pour exiger de meilleures indemnités de licenciement.

Depuis des années les responsables syndicaux n'ont soutenu les luttes du personnel contre les réductions d'effectifs et de revenus qu'avec la plus grande réticence.

Dès que la faillite a été annoncée, les syndicats ont accepté le plan social a minima des ministres et ils ont immédiatement ouvert des bureaux de renseignement administratif, loin de l'aéroport, dans différentes villes du pays, et se sont refusés à toute mobilisation.

Pourtant le personnel des transports publics, en Flandre comme en Wallonie, a fait 5 minutes de grève, à la même heure, pour protester contre les licenciements à la Sabena. Les journaux télévisés ont été retardés de 30 secondes par les présentateurs. Ces actions symboliques montraient que l'immense majorité de la population n'était pas d'accord avec ces licenciements.

Dimanche 11 novembre, une manifestation avait été appelée à Zaventem, près de l'aéroport, par des membres du personnel, relayés par l'association des pilotes. Les syndicats s'y étaient ralliés de mauvaise grâce et n'ont fait qu'une apparition symbolique. Dix mille manifestants, surtout de la Sabena, se sont trouvés réunis, mais sans organisation, sans mot d'ordre et sans perspective. La police, elle, était en force. La manifestation a plutôt été ressentie comme un enterrement d'une lutte qui aurait été possible, alors que le gouvernement continue d'annoncer des milliers de suppressions d'emplois à La Poste et va vers la privatisation rampante de la SNCB, la société nationale des chemins de fer belges.

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