Toulouse : Total totalement responsable, autorités complices !05/10/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/10/une-1733.gif.445x577_q85_box-0%2C11%2C166%2C227_crop_detail.jpg

Editorial

Toulouse : Total totalement responsable, autorités complices !

Une semaine après l'explosion de l'usine AZF, à Toulouse, l'émotion et l'indignation qu'elle provoque ne sont pas retombées. Ni à Toulouse ni ailleurs. Et cela se comprend ! Aux morts, aux blessés, dont plusieurs dizaines sont dans un état grave, s'ajoutent la désolation d'une partie de la ville détruite ou gravement endommagée, ainsi que l'inquiétude et la détresse de toute la population.

Il ne faudrait pas que la discussion qui s'engage aujourd'hui sur la cause de cette explosion escamote des responsabilités qui, elles, sont déjà avérées. Il n'est pas besoin d'attendre les résultats d'une enquête qui risque d'être fort longue, en supposant même qu'elle aboutisse. Tout d'abord la responsabilité de TotalFinaElf est entière, tout comme celle des autorités qui ont laissé faire, depuis des dizaines d'années. Aussi bien en ce qui concerne le contrôle des règles de sécurité dans des sites à risque, qu'en ce qui concerne le développement d'une urbanisation qui ne pouvait qu'aggraver considérablement les conséquences d'une explosion.

Oui, TotalFinaElf est totalement responsable, pour ne pas pas avoir investi ce qui aurait été nécessaire à la mise en oeuvre d'une sécurité maximum. S'il ne l'a pas fait, c'est uniquement pour ne pas entamer ses profits. L'ensemble du patronat agit de la sorte. Et s'il n'y a pas partout des explosions comme celle de Toulouse, il y a eu, durant l'année 2000, 746 accidents de travail mortels, et des centaines de milliers d'accidentés du travail, victimes de cette même soif du profit.

Les autorités ne sont pas, elles non plus, innocentes. Elles sont coupables d'avoir laissé les mains libres à ces patrons, grands ou moins grands. Elles n'ont rien fait et ne prévoient pas grand-chose pour que les règlements existants en matière de sécurité soient appliqués. Et pourtant ces réglementations sont notoirement insuffisantes, pour ne pas dire complaisantes à l'égard de ces patrons. Ainsi la DRIRE, l'organisme chargé de contrôler la mise en place des règles de sécurité, se plaint de ne disposer que d'un nombre dérisoire de contrôleurs. Et c'est vrai. Mais elle a pour consigne officielle de ne pas compromettre, par ses interventions, la marche des entreprises. Et le comble, c'est que ce sont les chefs d'entreprise qui sont eux-mêmes chargés de signaler aux organismes de contrôle les risques que peuvent provoquer leurs installations et d'indiquer les mesures qu'ils envisagent pour y pallier.

Ajoutons que, même quand les infractions aux règles de sécurité sont connues, et elles le sont forcément, les autorités laissent faire. Quand les a-t-on vu intervenir pour mettre fin à cette situation ? Quand a-t-on vu la police et la justice agir avec la même rigueur que lorsqu'il s'agit d'un contrevenant ordinaire ?

Jospin a promis que l'Etat consacrerait un milliard et demi aux victimes de l'explosion. Nettement moins que les 8 milliards que coûterait, selon les estimations, la réparation des dégâts. Il s'est empressé de préciser qu'une partie de cette somme irait aux entreprises. Encore elles !

N'est-il pas choquant que l'on utilise encore une fois l'argent public, c'est-à-dire, entre autres, l'argent des victimes, pour exonérer financièrement TotalFina et son Pdg Desmarest de leurs responsabilités ? Comme cela avait été le cas après le naufrage de l'Erika.

Dans une tribune du journal Le Monde, le Pdg de TotalFinaElf parle de sa "responsabilité d'industriel". Mais ce trust, qui a réalisé l'année dernière les plus gros profits jamais obtenus par une entreprise française, a le cynisme de jeter 20 millions de francs aux victimes pour des dégâts qui sont chiffrés au bas mot à huit milliards, et cela sans parler de la douleur des familles des victimes qui, elle, ne se monnaie pas. L'intégralité des dégâts matériels doit être payée par ce trust.

Alors, oui, "plus jamais ça", ni à Toulouse ni ailleurs. Mais cela exige un contrôle draconien de ce type d'entreprises, avec la participation des travailleurs et sous leur surveillance.

Partager