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Leur société
La nouvelle hausse du chômage
Depuis quelques mois, le taux de chômage en France est reparti à la hausse. En août, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits à l'ANPE a grimpé de 11 000. Il y a aujourd'hui 2 127 800 chômeurs officiellement recensés, sans compter les 400 000 chômeurs qui ont travaillé, au moins à mi-temps, au mois de juillet et les 800 000 qui cherchent un emploi à temps partiel ou pour un temps limité et qui, de ce fait, ne figurent pas dans les statistiques. Et sans compter non plus les chômeurs qui ne sont pas inscrits à l'ANPE et dont une étude récente du CERC nous dit qu'ils se comptent en centaines de milliers...
Jospin doit être déçu. Pas forcément parce qu'il est préoccupé par le sort des chômeurs, mais parce que la baisse régulière du chômage depuis trois ans était son principal argument électoral. Il avait déjà largement commencé sa campagne en se glorifiant de sa politique économique, qui serait en voie de vaincre le chômage, et il évoquait encore récemment la possibilité du retour au plein emploi.
Mais ni Jospin ni Chirac d'ailleurs ne dictent leurs choix aux patrons et à l'économie. Ils ne peuvent que constater les décisions des employeurs, qui, en ce moment, ont décidé de ne pas embaucher. Jospin a bénéficié, au cours de ces trois dernières années, de ce que les économistes appellent une « bonne conjoncture », c'est-à-dire une période où les patrons avaient décidé d'investir, modestement, dans la production et d'embaucher, essentiellement d'ailleurs des précaires. Mais depuis plusieurs mois, les mêmes employeurs ont fermé le robinet à embauches, ce qui, dans la langue de bois jospinienne, se traduit par cette déclaration : « La pente naturelle de l'emploi n'est plus spontanément à la baisse du chômage ».
Alors que vont faire les Jospin, Fabius et Guigou ? Essayer de redonner le moral aux patrons, avec des grandes phrases, mais surtout avec de gros cadeaux. Côté grandes phrases, Jospin a fait appel au « patriotisme économique » et à « la responsabilité presque civique des chefs d'entreprise et des consommateurs ». Cela lui a attiré immédiatement cette réponse de Seillière, le patron des patrons : « Les entreprises françaises et le Medef sont fondamentalement patriotes... mais les mots ne suffisent pas ». En effet, le patriotisme est surtout une affaire de gros sous. Les patrons n'embaucheraient, éventuellement, que si on leur garantissait des conditions en or.
Côté subventions aux patrons, le gouvernement se dépèche de préparer un plan pour « soutenir l'économie française ». Sans grande imagination d'ailleurs, presque tout ayant déjà été essayé dans ce domaine. Quelques mesures sont prévues pour relancer la consommation, comme le doublement juste avant les élections de la « prime à l'emploi » dont bénéficient les salariés du bas de l'échelle. Mais le gouvernement prépare surtout une série de nouveaux emplois « jeunes », précaires, mal payés, presque gratuits pour les employeurs puisque pris en charge en grande partie par l'Etat. Il envisage aussi quelques cadeaux directs, comme une nouvelle baisse de la taxe professionnelle. La seule nouveauté, encore en discussion, serait une aide directe pour pousser les patrons à investir, le montant des investissements industriels étant lui aussi à la baisse.
En résumé, les investissements des entreprises seront soutenus par l'Etat et les salariés en grande partie payés par l'Etat, mais les bénéfices continueront de tomber dans la poche des patrons ! Belle façon de montrer qu'au lieu de s'encombrer des capitalistes et de leurs profits, il serait bien plus logique que l'Etat investisse et embauche lui-même directement...