Ridalis, "motos-crottes" parisiennes : Une grève qu'on n'est pas près d'oublier29/06/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/06/une-1720.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Ridalis, "motos-crottes" parisiennes : Une grève qu'on n'est pas près d'oublier

Après 10 jours de grève, l'assignation au tribunal de grande instance de Paris, mardi 19 juin, avait été l'occcasion d'un rassemblement dynamique au Palais et nous avait confortés dans notre détermination.

Le lendemain, chez les grévistes, beaucoup pensaient que le résultat serait en notre faveur ; la justice ne pouvait pas donner raison à un patron qui nous accusait de faits inexistants alors que lui n'applique pas le Code du Travail !

Le jour suivant, une entrevue entre quatre représentants des grévistes et l'inspectrice du travail avait encore renforcé la détermination de tous : d'après elle, Ridalis était dans son tort sur la convention collective et sur la plupart des contrats d'intérim.

Nous avons alors décidé de mettre un coup de pression sur la mairie de Paris car c'est quand même elle le donneur d'ordre. Rendez-vous a été pris avec le maire socialiste du 9e, Jacques Bravo, et nous sommes allés en manif à sa mairie pour lui demander une entrevue d'urgence avec Delanoë.

Son chef de cabinet et une adjointe nous ont reçus à une dizaine représentants des grévistes et des UL CGT des 9¯ et 14¯ arrondissements, ainsi qu'un conseiller régional Lutte Ouvrière qui nous soutient depuis le début.

Ils ont dû écouter les raisons de la colère et notamment sur le manque d'implication de la mairie de Paris dans cette grève. Ils disaient qu'ils nous soutenaient et assuraient qu'ils transmettraient au plus vite nos revendications, mais nous sentions qu'ils étaient gênés, en particulier quand on leur a demandé ce qu'ils pensaient de l'interview de Contassot, adjoint de Delanoë, à la presse, disant que les "motos-crottes" coûtent trop cher et qu'il veut s'en débarasser en janvier 2002.

En sortant, nous avons appris le résultat du référé : la juge donnait raison à Ridalis, ordonnait l'expulsion des "éléments extérieurs" et des sanctions pour toute pression sur les non-grévistes, et nous condamnait à payer les frais de justice et d'huissiers (15 000 F par jour depuis dix jours). Une fois le coup encaissé, c'est la colère qui a prévalu et les discussions sur le parti pris de la Justice pour les patrons allaient bon train !

Lundi 25 juin, nous sommes retournés à une cinquantaine, en manif, chercher la réponse de la mairie du 9e. Cette fois-ci on s'est invités sans prévenir. Plusieurs grévistes et délégués ont expliqué qu'ils en avaient marre du silence de la mairie de Paris et des coups bas dans la presse, qu'il fallait une entrevue urgente avec l'Hôtel-de-Ville de Paris.

Là encore, Bravo a répété qu'il s'engageait personnellement à obtenir une entrevue avec Contassot "dans l'urgence", mais qu'il fallait que le patron de Ridalis négocie "car ce ne serait pas juste que ce soit la Ville-de-Paris, donc les contribuables qui paient".

Cette entrevue a eu lieu, l'après-midi même, et il en est sorti une "table ronde" avec les patrons de la SITA pour 19 h., c'est-à-dire alors que la quasi-totalité des grévistes étaient rentrés chez eux.

Le piège a fonctionné : n'ayant pas à subir la pression des travailleurs en grève, cette réunion, qui a duré jusqu'à 23 h., histoire de bien épuiser les quelques grévistes qui restaient, a permis aux cinq patrons de cette filiale de la Lyonnaise des Eaux de discuter sur leur terrain : la Convention du Nettoyage appliquée chez Ridalis est aussi intéressante que la Convention du Déchet sur bien des points et surtout cela reviendrait à renoncer au cadeau que fait l'Etat aux patrons d'un abattement de 10 % sur les charges sociales. La Lyonnaise des Eaux ne peut évidemment pas se permettre de perdre cela !

Les patrons n'ont rien lâché sur l'essentiel des revendications de grévistes. Mais nos camarades menacés de licenciement ont obtenu ce qu'ils voulaient, les intérimaires vont vraisemblablement être embauchés et des petites choses comme l'arrivée de plusieurs dizaines de nouvelles tenues propres, ce qu'on n'avait pas vu depuis deux ans, sont des signes que les chefs vont nous laisser tranquilles pendant un temps.

Et puis surtout, bien que travaillant dans une petite entreprise, notre détermination nous a permis de tenir tête quelque temps à la Lyonnaise des Eaux, et de nous faire entendre par les médias et par les mairies, et de perdre certaines illusions sur les élus socialistes.

Nous ne sommes pas prêts d'oublier les deux semaines que nous avons passées à nous battre ensemble et on sait ce qu'il faudra faire si les patrons reviennent à l'attaque.

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