Allemagne : Abstention électorale et attaques antiouvrières20/04/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/04/une-1710.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Allemagne : Abstention électorale et attaques antiouvrières

Les élections municipales et régionales qui viennent de se dérouler, en mars, dans trois Länder ont été caractérisées par une montée significative de l'abstention.

Aux régionales de Rhénanie-Palatinat la participation est ainsi tombée de 70,8 % en 1996 à 62,1 % cette année. Dans le Bade-Wurtemberg elle est descendue à 62,6 %. Et lors des municipales de Hesse, seulement 53,1 % des électeurs se sont rendus aux urnes, soit treize points de moins que la fois précédente ! Et le taux d'abstention est particulièrement significatif dans les quartiers ouvriers.

Alors, même si le Parti Social-Démocrate (SPD) du chancelier Schröder s'est réjoui d'avoir progressé lors de ces élections, il est évident que de très nombeux électeurs sont restés chez eux, dégoûtés des partis traditionnels et faute d'alternative. Quant aux Verts, l'autre parti de la coalition gouvernementale, ils reculent nettement et payent une fois de plus auprès de leur électorat les couleuvres qu'ils ne font qu'avaler, comme le récent rapatriement de déchets nucléaires de la Hague vers l'Allemagne.

Mais l'électorat populaire du SPD a bien d'autres raisons d'avoir boudé les urnes. C'est que le gouvernement Schröder est en place maintenant depuis deux ans et demi et chacun a pu mesurer qu'il menait une politique au service des classes possédantes.

Cela s'est encore illustré récemment par une attaque contre les pensions de retraite. Il a ainsi fait adopter par le Bundestag une réforme qui prévoit, l'introduction, dès 2002, de retraites par capitalisation. Cette mesure doit encore être approuvée par le Bundesrat, la chambre des Länder, mais étant donné que la droite y est majoritaire, il y a peu de chances qu'elle soit annulée.

La retraite légale est fixée en Allemagne à 63 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes. On touche alors en moyenne 70 % du salaire brut. Il est possible cependant de partir à 60 ans mais avec un abattement de 18 % par rapport à la pension prévue pour un départ à 65 ans.

Mais depuis longtemps le patronat estime qu'il paie trop pour les retraites. Alors, les travailleurs ont eu droit à l'argument éculé : la population vieillit de plus en plus et le système par répartition ne pourra plus faire face. Il faut donc que chacun cotise dans des fonds de pension qui placeront en Bourse l'épargne ainsi créée jusqu'à l'âge de la retraite.

Dans un premier temps cette possibilité sera limitée puisque chaque salarié ne pourra épargner que jusqu'à 4 % de son salaire, avec le soutien de l'Etat qui apportera un petit abondement. Mais l'essentiel est ailleurs. Car ce premier pas ouvre la porte à d'autres évolutions, et il faudra cotiser de plus en plus étant donné que le gouvernement a déjà décidé que le niveau des retraites par répartition allait, à terme, baisser. Tant pis pour tous ceux qui ne pourront pas épargner parce que leurs revenus seront insuffisants (une statistique récente fait état de 9 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté). D'autant que les entreprises ont obtenu de ne pas participer au financement de ces fonds de pension.

De son côté la direction du DGB, la grande fédération syndicale, n'a rien fait pour s'opposer à ce projet ni pour relayer les initiatives prises localement par un certain nombre de militants syndicaux pour dénoncer les projets antiouvriers du gouvernement. Loin de proposer par exemple que l'on prenne sur les profits des entreprises pour assurer les retraites futures, le DGB a non seulement accompagné la réforme mais envisage de créer ses propres fonds de retraite.

Mais c'est dans bien des domaines que le SPD s'en prend aux intérêts des salariés. Le gouvernement d'Helmut Kohl avait ainsi, en 1985, élaboré une loi dénommée pompeusement " de soutien à l'emploi " et qui permettait en réalité aux entreprises de généraliser les contrats à durée déterminée. Comme cette loi arrivait à expiration le premier janvier 2001, le gouvernement SPD-Verts l'a prolongée, en n'y apportant que des modifications de détail, mais en ne diminuant absolument pas les possibilités, pour le patronat, de créer des emplois précaires.

Et comme si cela ne suffisait pas, le chancelier vient tout récemment d'appeler les Offices du travail (l'ANPE allemande) à faire preuve de davantage de fermeté avec les chômeurs qui refusent les opportunités qui leur sont proposées. " Le droit à la paresse n'existe pas dans notre société... cela si-gnifie : une personne qui peut tra-vailler mais refuse un emploi ac- ceptable peut se voir réduire son allocation " a-t-il ainsi déclaré dans une interview parue dans le grand quotidien populaire Bild début avril, alors que le nombre de sans-emploi vient de progresser en mars pour le troisième mois consécutif et que le pays compte, officiellement, 4 millions de chômeurs.

Alors, si les travailleurs allemands n'ont pas, pour l'instant, trouvé les moyens de mettre un coup d'arrêt à ces attaques, ils ne peuvent qu'être de plus en plus conscients que le gouvernement actuel est dans le camp d'en face, et que pour se défendre, ils ne pourront compter que sur eux-mêmes.

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