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Leur société
Lyon : Sept sans-papiers déboutés par la préfecture - quatrième semaine de grève de la faim
Sept sans-papiers ont commencé une grève de la faim, le 26 février dernier, pour obtenir leur régularisation et la réouverture des négociations sur l'ensemble des dossiers en litige à la préfecture du Rhône.
Cinq des sept grévistes ont vécu toute leur enfance en France, dont Tania et Mourad qui sont même nés en France. Tous les cinq sont retournés dans leur pays d'origine, soit contre leur volonté, soit pour des raisons familiales graves, avant leur majorité. A leur retour, les portes étaient fermées : refus d'un visa, refus d'une carte de séjour régulière, tracasseries administratives. L'un d'entre eux est le père d'une fille aujourd'hui majeure et de nationalité française mais cela n'a rien changé pour lui : il n'a plus de papiers depuis dix ans.
Les deux autres ont vécu et travaillé plusieurs années en France. Adil est venu pour s'occuper de son père qui travaille en France depuis 1970 et qui est invalide suite à un grave accident du travail. Saïd a déjà dû subir plusieurs séjours en centre de rétention administrative.
Tous ont déposé plusieurs demandes de régularisation à la préfecture, aussi bien avant l'arrivée de Jospin au gouvernement qu'après les promesses faites par Chevènement en 1997, promesses qui avaient ranimé leurs espoirs. Mais, avant comme après, on leur a opposé un refus catégorique sous des motifs variés : célibataire, pas de logement fixe, pas de travail fixe... Mais comment avoir un travail et un logement fixes quand on n'a pas de papiers ?
Plusieurs des grévistes dénoncent d'ailleurs les conditions de vie et de travail qu'ils ont souvent été obligés d'accepter en tant que clandestins : 100 F par jour pour travailler sur les marchés ; 200 F pour plus de dix heures sur des chantiers dans le bâtiment. Cette situation arrange les patrons. Saïd s'indigne contre le patronat et le gouvernement français qui se plaignent de manquer de main-d'oeuvre alors qu' "ils n'ont qu'à régulariser tous les sans-papiers et ils auront de la main-d'oeuvre".
Tous en ont assez du travail clandestin, de la peur permanente des arrestations, de leurs vies familiales brisées.
Devant les échecs répétés de leurs demandes et devant l'entêtement de la préfecture, ils ont décidé d'entamer une grève de la faim le 26 février. Le 7 mars, ils se sont installés dans une église du 1er arrondissement d'où l'archevêché... les a fait déloger dans la soirée. Après avoir été ballottés quelques heures entre les locaux des Verts - dont le maire du 1er arrondissement est un dirigeant - puis du PCF, c'est finalement un centre culturel associatif qui a accepté de les accueillir.
Depuis, un comité de soutien s'est formé et des manifestations sont organisées deux fois par semaine au centre-ville. La préfecture n'a reçu qu'une seule fois les porte-parole des grévistes. Elle ne semblait pas connaître leurs dossiers et s'est contentée de répéter "qu'ils n'entraient pas dans les critères de régularisation" mais également "qu'ils n'étaient pas expulsables".
C'est la situation inextricable et humainement intolérable créée par la circulaire Chevènement. C'est aussi la conséquence de la lâcheté politique du gouvernement Jospin qui refuse de régulariser en bloc quelques dizaines de milliers de sans-papiers pour ne pas heurter certains électeurs racistes ou anti-immigrés.
A Lyon, le tout nouveau maire de la ville, le socialiste Gérard Collomb, est bien digne de Jospin : il a parlé de générosité dans ses discours électoraux, il a voulu se poser en rempart face à Millon et à la droite la plus conservatrice, mais il n'a pas daigné intervenir en faveur des sans-papiers. Ces derniers l'ont pourtant sollicité de multiples fois, et ont organisé des rassemblements hebdomadaires devant sa permanence. Mais Collomb voulait récupérer les voix du centre et même celles de la droite et n'allait tout de même pas se compromettre en soutenant les sans-papiers !
Ce n'est pas sur ces gens-là que les sans-papiers doivent compter mais sur leur propre détermination ainsi que sur le soutien et la solidarité de tous ceux que leur situation révolte. Les manifestations en ville et devant la préfecture continuent le mercredi et le samedi. Lutte Ouvrière appelle évidemment à y participer le plus nombreux possible.