Le Mans : Un exemple édifiant de "petit boulot"02/03/20012001Journal/medias/journalnumero/images/2001/03/une-1703.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans les entreprises

Le Mans : Un exemple édifiant de "petit boulot"

Une dizaine de salariés de DEPresse, une entreprise de portage de journaux située au Mans, viennent de faire huit jours de grève pour protester contre leurs conditions de travail et de rémunération. L'entreprise, qui emploie une grosse quarantaine de salariés, dont treize dans l'équipe de portage à domicile du quotidien Ouest France (celle qui a fait grève) a été rachetée voilà deux mois par un nouveau patron, qui se vante d'avoir déjà racheté, "retapé" et revendu deux sociétés.

Le travail de portage est considéré comme un travail d'appoint, de deux heures par jour. Mais il faut se lever très tôt, partir de chez soi vers 3h15 du matin pour préparer le travail, et les tournées sont trop longues pour être faites en 2 heures. On n'est donc pas rentré chez soi avant 7h30 du matin. Mais après ce travail "de complément" on est sans doute frais comme un gardon pour un "travail principal".

En réalité, la boîte fait travailler des personnes en situation difficile, pour lesquelles c'est parfois l'unique source de revenus. Les salariés sont payés 0,42 F ou 0,63 F l'exemplaire, selon que la livraison se fait en ville ou en campagne. Plus une indemnité de 0,83 F du kilomètre, tirée d'un barème pour deux roues alors que tous utilisent leur voiture, dont la boîte de vitesse est particulièrement malmenée. Le travail du dimanche est ridiculement indemnisé : quelques francs seulement.

Tout cela donne des paies très faibles. Certaines sont de 2 700 F, d'autres de 4 500 F, selon la longueur de la tournée quotidienne, le nombre de journaux mis dans les boîtes aux lettres (200 à 300), en secteur ville ou en secteur campagne, le nombre de jours travaillés (dimanche compris ou non, des salariés travaillent 7 jours sur 7 depuis des mois, sans jour de repos). C'est-à-dire pour 4 000 à 8 000 journaux livrés et des centaines de kilomètres parcourus dans le mois.

Le patron a embauché une dizaine de personnes pour faire le travail des grévistes... qu'il a expulsés des locaux. Pas intimidés, ils se sont installés à quelques-uns sur le bord (très étroit) de la route, devant l'entreprise, sur des chaises de camping, avec des badges CGT et une banderole réclamant notamment le rattachement à une convention collective, ou à défaut le simple respect du Code du travail, une indemnité kilométrique pour voitures... Ils sont aussi allés voir la rédaction de Ouest France, qui a refusé de parler de leur mouvement, et celle du Maine Libre qui a fait de même par solidarité pour... Ouest France.

Au bout de huit jours, le patron s'est dit disposé à porter à 200 F l'indemnité de dimanche, et à accorder une prime spéciale de 500 F. C'est à vérifier sur le long terme, mais rien que cela, c'est déjà la preuve que ce monsieur a dû en rabattre et que les grévistes ont fait respecter la dignité des salariés.

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