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- Lutte ouvrière n°1692
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Leur société
Et sans l’hélice!
Les militaires n'auront pas leur cadeau de Noël. Le porte-avions Charles-de-Gaulle est à nouveau hors service, il a perdu une de ses hélices lors des derniers essais au large de la Guadeloupe. Deux millions de francs sont ainsi partis à l'eau. La marine nationale avait, paraît-il, payé très cher cette hélice à la société Atlantic Industrie pour qu'elle soit «furtive» et laisse le moins de traces possible. Pour cela au moins, c'est réussi. A l'occasion, le Charles-de-Gaulle a cependant démontré sa capacité à détruire un objectif situé à des milliers de kilomètres. Les locaux où avait été fabriquée l'hélice et où étaient entreposés les documents à son sujet ont été réduits en cendres par un incendie, que la police qualifie de criminel, peu de temps après l'avarie et juste avant la visite d'une commission d'enquête...
L'argent gaspillé dans cette hélice, manifestement fissurée dès son montage, vient s'ajouter à l'addition déjà lourde des avaries survenues depuis un an : la piste d'envol prévue trop courte qu'il a fallu allonger de 4,40 mètres à raison de 14 000 F le centimètre, les safrans arrière qui ont dû être déplacés parce qu'ils faisaient vibrer le navire à grande vitesse, les pompes du circuit de refroidissement des réacteurs nucléaires mises en réparation dès la première sortie. Mais au-delà, c'est toute la fabrication de matériel militaire qui est un immense gâchis. Le Charles-de-Gaulle et son aviation auront coûté 80 milliards de francs, infiniment plus par exemple que les sommes recueillies en quatorze ans de Téléthon. Et sur ces 80 milliards, comme sur tous les programmes militaires, une bonne partie sont des cadeaux purs et simples faits à des sociétés privées et à des grands trusts avec l'argent des contribuables.
Plus coûteux encore que les avaries du porte-avions nucléaire, on pourrait citer le programme «Rafale». Alors que le prototype de cet avion de combat avait volé en 1986, seuls cinq exemplaires ont décollé depuis sur les cent trente-sept annoncés! L'hélice engloutie du Charles-de-Gaulle rejoint ainsi toute une panoplie d'avions n'ayant jamais volé, de missiles n'ayant jamais explosé - ce qu'évidemment personne, à part les boute-feu de l'armée, ne regrette. Mais cela n'a pas empêché de creuser ces véritables abysses dans le budget.