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- Lutte ouvrière n°1690
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Leur société
La justice, injuste et sans moyens!
Lundi 27 novembre, de nombreux tribunaux étaient paralysés par le mouvement de grève et de protestation des greffiers, un personnel sur qui repose en fait une bonne partie du fonctionnement de la justice. En effet ce sont eux qui organisent les audiences des tribunaux, prennent les comptes-rendus, certifient la validité des jugements, assistent les juges en général, bref font fonctionner une bonne part du système.
Dans certains tribunaux, le mouvement a été reconduit. Dans plusieurs tribunaux ce mouvement a reçu l'appui des magistrats. Ce mouvement de protestation massif contre le manque de moyens accordés prend le relais de celui initié par les avocats la semaine précédente. C'est un nouvel indice du délabrement du système judiciaire en France.
Il n'y a pas si longtemps, c'était le personnel pénitenciaire qui protestait de son côté. Pour ce gouvernement, comme pour ceux qui l'ont précédé, le fait de mettre des moyens à disposition pour faire fonctionner correctement l'institution judiciaire n'est en rien une priorité. Résultat : les tribunaux sont engorgés et la moyenne des plaignants doit patienter des années pour voir éventuellement leurs droits reconnus dans un litige ordinaire. A titre d'exemple, il n'est pas rare dans certains tribunaux, de devoir attendre des semaines, voire des mois, pour que le jugement déjà rendu soit tapé à la machine.
Et comme toujours ce sont les classes populaires qui pâtissent le plus de cette situation. Les lois en général sont faites pour protéger la propriété et les intérêts des plus riches, ce qui rend la justice inégalitaire par nature dans cette société. Mais pour faire respecter, ne serait-ce qu'en partie, leurs intérêts, les tribunaux sont un recours indispensable pour de nombreuses personnes : conseils de prud'hommes, tribunaux d'instance... Le fait de devoir attendre des mois, voire plus d'un an pour être entendu est insupportable pour beaucoup.
Ceux qui ont de la fortune ont le temps éventuellement d'attendre, et peuvent se payer une armée d'avocats pour veiller à leurs intérêts. Ils peuvent entreprendre des procédures multiples et coûteuses, hors de portée du commun des mortels. D'ailleurs les tribunaux spécialisés dans les affaires des possédants, les tribunaux de commerce, jugent dans les temps impartis et sont loin d'avoir les mêmes problèmes de sous-effectifs permanents. De même si un patron veut faire expulser les travailleurs d'une usine en grève quelques heures lui suffisent pour avoir le droit de faire appel à la police pour s'attaquer aux grévistes.
Et c'est ainsi que la population se retrouve doublement sanctionnée face au système judiciaire : non seulement les lois sont injustes mais le système engorgé est incapable de garantir les quelques droits du plus grand nombre. Et l'on comprend la protestation des greffiers, ces soutiers du système judiciaire, quand ils constatent qu'ils n'ont même pas les moyens de rendre les services que la population des justiciables serait en droit d'attendre.