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Espagne - Les attentats de l'ETA : Une politique criminelle
L'attentat à la voiture piégée qui a eu lieu à Madrid lundi 30 octobre représente un pas de plus dans l'escalade de violence terroriste, aveugle et criminelle que les dirigeants de l'ETA poursuivent depuis plusieurs mois.
Cette fois l'attentat n'avait pas seulement pour cible une personnalité politique et ses accompagnateurs. Il était fait pour tuer aussi de simples habitants de Madrid et créer un climat d'insécurité dans la population. Et si tous les attentats perpétrés depuis la rupture de la trêve sont de sinistres meurtres qui n'ont rien à voir avec la lutte violente qu'un peuple opprimé peut être conduit à mener pour conquérir sa liberté, celui-ci est encore plus révoltant. Il rappelle d'autres périodes où les attentats de l'ETA avaient aussi fait des victimes parmi la population dans diverses régions d'Espagne.
La population du Pays basque doit avoir le droit de choisir ses liens avec l'Etat espagnol. Et les gouvernements qui depuis des décennies lui refusent ce droit et répondent aux aspirations des séparatistes par la violence policière sont indiscutablement les premiers responsables de la situation dramatique qui existe au Pays basque. L'intransigeance d'Aznar, le dirigeant de droite du Parti Populaire, la violence de la répression qui frappe les militants séparatistes, le refus de regrouper les prisonniers, les méthodes scandaleuses de la guerre menée par Franco, puis par les gouvernements centristes, socialistes et aujourd'hui de droite contre les militants séparatistes, leur refus de régler politiquement le problème basque en prenant en compte l'existence et le poids de l'ETA contribuent à renforcer la légitimité de cette organisation parmi une partie de la population basque et surtout parmi la jeunesse.
Il est clair que depuis plusieurs mois, le chef du gouvernement, Aznar, cherche à provoquer une rupture entre les nationalistes basques modérés du PNV et les séparatistes de l'ETA. Et la pression qu'il exerce pour isoler totalement l'ETA et les représentants de Herri Batasuna qui en est le bras politique, contribue incontestablement à aggraver le climat de tension qui existe au Pays basque.
Mais la politique d'Aznar ne rend pas plus acceptables les méthodes des dirigeants séparatistes. A cause des crimes barbares qu'elles engendrent, mais pas seulement. L'exacerbation du nationalisme basque qu'ils cultivent est un poison et un piège en premier lieu pour la population basque mais aussi pour toutes les classes populaires d'Espagne. L'exacerbation des antagonismes entre Basques et non Basques, dans les provinces basques mais aussi dans le reste de l'Espagne, le sang versé, la peur des attentats contribuent à creuser un fossé entre la population basque et celle des autres régions. Et cette situation contribue à tirer la société en arrière.
Car la réprobation que suscitent ces attentats contribue à justifier auprès de bien des Espagnols la politique réactionnaire et policière d'Aznar. Elle fait passer au second plan les méfaits de la politique antiouvrière du gouvernement. Une politique dont les travailleurs et les jeunes qui vivent au Pays basque sont victimes, mais aussi l'ensemble de ceux qui en Espagne subissent le chômage, les contrats précaires, les bas salaires.
Les dirigeants de l'ETA utilisent à leur façon et à leur échelle les mêmes méthodes que l'Etat espagnol. Ils prônent la solidarité entre Basques, entre bourgeois basques et travailleurs basques. Ils élargissent toujours davantage le fossé entre travailleurs basques et non basques et montrent en cela que leurs objectifs sont profondément réactionnaires. Par ailleurs, en multipliant les actions terroristes réalisées par un petit appareil militaire agissant indépendamment de tout contrôle de la population, les dirigeants de l'ETA montrent que loin de préparer l'émancipation des exploités au Pays basque, ils rêvent de mettre en place, en cas de succès, un pouvoir indépendant peut-être, mais un pouvoir dictatorial où ils imposeraient aux classes populaires basques l'exploitation par des bourgeois basques et où ils seront les premiers à violer les droits des minorités qui vivront sur les territoires qu'ils dirigent.