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Dans le monde
Israël-Palestine : La droite provoque, la gauche l'accepte et envoie l'armée
Même si le mardi 3 octobre il pouvait sembler que les affrontements opposant les Palestiniens à l'armée israélienne baissaient en intensité, même si l'armée israélienne semblait se retirer d'une partie des Territoires, personne n'osait encore prédire ce jour-là que les quatre journées de quasi-guerre étaient terminées.
Les émeutes ont évidemment fait craindre une nouvelle Intifada à tous ceux qui, de près ou de loin, ont quelques intérêts à ne pas voir la population palestinienne s'engager sur les chemins de la révolte. L'Intifada, ce soulèvement de la population palestinienne entre 1987 et 1993, avait d'ailleurs elle aussi commencé de façon soudaine, au lendemain d'un grave accident de la route au cours duquel quatre Palestiniens avaient été écrasés par un camion israélien.
Cette fois-ci, tout a commencé le jeudi 28 septembre avec la venue d'Ariel Sharon, un des chefs du parti de droite, le Likoud, sur l'esplanade des Mosquées à Jérusalem pour proclamer que son parti ne consentirait jamais à ce qu'Israël cède la plus petite partie de Jérusalem. Pour que sa provocation bénéficie d'un maximum de publicité, Sharon avait choisi précisément cette esplanade où en septembre 1996, il y a tout juste quatre ans, l'ouverture d'une entrée à un tunnel archéologique avait été le prélude à des émeutes faisant 83 morts (67 Palestiniens et 16 Israéliens).
Autant dire que le nouveau bain de sang avait été ouvertement programmé et orchestré. Rien d'étonnant de la part de cet ancien général réactionnaire qui commanda l'invasion israélienne du Liban en 1982 et qui, à ce titre, a eu une part de responsabilité déterminante dans le massacre de milliers de femmes, d'hommes et d'enfants palestiniens dans les camps de Sabra et Chatila par des miliciens libanais d'extrême droite. Alors, bien sûr, la provocation d'un tel homme ne pouvait qu'enflammer le ressentiment et la colère des Palestiniens.
Il se peut que les motivations de Sharon se soient limitées à empêcher son rival, l'ancien Premier ministre Nétanyahou, de le doubler sur sa droite. En effet, la veille avait été annoncée la fin des poursuites judiciaires pour fraude et corruption à l'encontre de Nétanyahou, qui peut ainsi briguer à nouveau la direction du Likoud et, dans la perspective d'élections anticipées, devenir le candidat de droite le mieux placé pour rafler à nouveau le poste de Premier ministre. Or Sharon n'a pas du tout l'intention de céder la place. " Je suis le seul capable de battre Barak ", a-t-il au contraire affirmé.
Il se peut encore que Sharon ait voulu mettre au pied du mur le gouvernement travailliste de Barak. Auquel cas, la réussite a été immédiate. Quelle que soit l'ignominie d'un Sharon, c'est tout de même Barak et son gouvernement qui ont envoyé l'armée, qui ont permis que soit utilisé du matériel de guerre tel que des blindés, des chars lourds et des hélicoptères de combat. Et si le nombre des victimes palestiniennes ne cesse d'augmenter, se chiffrant par dizaines de morts et centaines de blessés, la responsabilité en incombe à Barak qui s'est bien gardé de prendre ses distances vis-à-vis d'un Sharon
En fait, il n'y a rien d'étonnant à tout cela. En la personne de Sharon la droite mène sa politique provocatrice, tandis que la gauche, non seulement laisse faire, mais lui emboîte le pas, comme cela s'est toujours fait dans le passé
En Israël, tous les gouvernements, qu'ils soient de gauche ou de droite, portent une responsabilité évidente dans l'exaspération des Palestiniens. L'accentuation des déceptions, les brimades de toute sorte, les répressions brutales et parfois sanglantes, l'accroissement de la misère ne peuvent conduire qu'aux affrontements qui viennent d'avoir lieu et qui ne sont peut-être pas terminés. Et cela d'autant plus que les déceptions succèdent aux espoirs, même vagues, d'une possible libération propagés par Arafat. Dans ces conditions, on comprend que la paix soit morte dans le coeur des Palestiniens et qu'une quelconque étincelle puisse à tout moment embraser les Territoires, voire comme aujourd'hui toucher les Arabes israéliens.
Quant aux impérialistes, certains, comme Chirac, ont le verbe haut mais tous ont le geste bas. Aucun n'a, par exemple, menacé Israël de rétorsions économiques au cas où ce pays continuerait sa politique de violence à l'encontre des Palestiniens. En fait, la seule force qui puisse contraindre les gouvernants israéliens, qu'ils soient de gauche ou de droite, à de nouvelles concessions est toujours la population palestinienne, sa mobilisation, sa révolte. Les récents événements ont donné un aperçu de sa détermination et de son courage.