Russie : Après un an de Poutine18/08/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/08/une-1675.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Dans le monde

Russie : Après un an de Poutine

Le 8 août dernier, un attentat a tué 8 personnes et en a blessé une centaine d'autres, en plein Moscou. Juste un an auparavant, le 9 août 1999, Eltsine présentait à la télévision Poutine qui, nommé Premier ministre, promettait de " liquider le terrorisme ", alors que la guerre reprenait dans le Caucase et en Tchétchénie.

Depuis des années, le pouvoir russe se sert du séparatisme des dirigeants tchétchènes pour faire des Tchétchènes des boucs émissaires, censés faire oublier tous les maux du pays à la population russe. Ainsi, cet automne, Poutine a lancé une seconde guerre de Tchétchénie dans l'espoir, sinon de mettre un point d'arrêt aux tendances centrifuges qui écartèlent la Russie et paralysent le pouvoir central, du moins de tenter de réaliser l'union sacrée derrière lui.

L'opération semble faire long feu à en croire même les sondages officiels qui enregistrent l'impopularité croissante de cette guerre parmi la population russe. Quant à tenir militairement la Tchétchénie... Dernier épisode en date : on vient d'annoncer que le maire pro-russe de Grozny a failli être assassiné par une bombe désamorcée in extremis.

Dans les hautes sphères de l'État, les choses ne vont pas mieux pour Poutine. Promettant la " dictature de la loi " lors de son élection, il avait annoncé vouloir restaurer l'autorité du centre sur le pays et sur son propre appareil d'État.

Évidement, c'était plus vite dit que fait. C'est ce que montre, à son niveau, le maire de Moscou, Loujkov, pourtant grand perdant des dernières élections législatives et présidentielle, qui vient de réussir à obliger l'État à lui céder ses parts dans le géant automobile Moskvitch, alors que le nouveau gouvernement de Poutine avait clamé vouloir mettre au pas les barons de la bureaucratie et briser leur emprise sur l'économie.

On en a eu un exemple encore plus net, cet été, dans la farce des poursuites engagées contre ceux que l'on appelle les " oligarques ". Ces fondés de pouvoir des clans rivaux qui dirigent l'État russe et qui tiennent des pans entiers de l'industrie et de la finance se retrouvèrent presque tous, du jour au lendemain, inculpés de privatisation illégale, de dissimulation fiscale, d'évasion de capitaux. L'un deux se retrouva même en prison. Et puis, on a annulé ou suspendu les poursuites, Poutine ayant dû faire amende honorable face aux représentants des clans politico-financiers qui mettent l'État en coupe réglée.

En province, Poutine a aussi essayé de s'imposer aux gouverneurs et présidents des 89 " sujets de la Fédération de Russie " qui ont transformé leurs régions en fief quasi-indépendant de Moscou.

Début mai, il a signé un décret nommant sept super-préfet (de l'armée et de la FSB, l'ex-KGB) pour contrer les gouverneurs et édicté une loi les privant de leur immunité judiciaire. La Douma (la Chambre des députés, où Poutine dispose d'une forte majorité) a entériné ces mesures, mais pas le Conseil de la fédération où siègent les gouverneurs. Ceux-ci ont fait savoir qu'au cas où Poutine tenterait de passer en force, la Conseil de la Fédération bloquerait les " réformes " annoncées par Poutine, et d'abord celles destinées à faire rentrer de l'argent des impôts. Le président du Tatarstan a ajouté que Poutine pouvait décider ce qu'il voulait, cela ne changerait rien tant que les gouverneurs et présidents locaux ont d'emprise sur leur fiefs...

Il n'a donc fallu que quelques mois à Poutine, le prétendu " homme fort ", pour n'apparaître guère moins faible que son prédécesseur Eltsine face aux puissances rivales qui font la pluie et le beau temps à la tête de la Russie et des régions.

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