L'accord sur la précarité dans la Fonction Publique : Du vent dans les branches de SAPIN21/07/20002000Journal/medias/journalnumero/images/2000/07/une-1671.gif.445x577_q85_box-0%2C13%2C166%2C228_crop_detail.jpg

Leur société

L'accord sur la précarité dans la Fonction Publique : Du vent dans les branches de SAPIN

Le gouvernement vient de signer, avec la quasi-totalité des syndicats de fonctionnaires, à l'exception de la CGT, un accord qui prétend résorber la précarité dans la Fonction publique, et le service public.

En fait, cet accord ne changera rien d'essentiel.

D'ailleurs dans le passé, l'Etat a été un exemple d'employeur usant et abusant de salariés sous statut... précaire. La récente mobilisation des salariés précaires des universités de Nancy-Metz pour le maintien de leur emploi vient de le rappeler.

Dans l'Education nationale, dans bon nombre d'établissements, 40 à 50 % du personnel enseignant et non-enseignant sont des salariés précaires. Il y a 20 ans, le premier gouvernement de gauche, sous la présidence de Mitterrand, avait titularisé nombre d'auxiliaires. Mais cela n'a pas empêché par la suite les gouvernements successifs de continuer à recourir tant et plus à une main-d'oeuvre précaire, multipliant même les variantes de contrats : contractuels, CES, vacataires, emplois-jeunes, auxiliaires. A tel point qu'aux dires mêmes du ministre de la Fonction publique, Michel Sapin, le gouvernement est incapable de dénombrer actuellement les emplois précaires dans toute la Fonction publique. Il serait question de faire l'état des lieux de cette précarité dans la fonction publique d'Etat, territoriale et hospitalière. Mais pour cette dernière, l'enquête est prévue pour le premier trimestre de l'an 2001. Autant dire que le recensement n'est pas pour demain. Et il ne s'agit que du recensement... !

Alors qu'attendre de ce énième plan de résorption de la précarité ? Il prévoit que les personnels devront remplir des conditions correspondant à des emplois normalement occupés par des titulaires. Ce qui signifie que les prétendants à la titularisation devront avoir été en fonction au moins deux mois entre le 10 juillet 1999 et le 10 juillet 2000 et pendant au moins trois ans d'équivalent temps plein au cours des huit dernières années. Ces conditions de titularisation cachent mal le désir du gouvernement de maintenir une certaine dose de précarité dont il tire avantage. Avant même que l'on passe à la mise en pratique de cet accord, en sont exclus les précaires n'ayant pas la nationalité française, et ils sont nombreux. Ne sont pas non plus concernés les CES, les emplois-jeunes, tout le secteur de La Poste, une cinquantaine d'établissements publics tel l'INSEE où travaillent nombre de précaires, ainsi que tous ceux qui ne remplissent pas les conditions exigées pour la titularisation. L'autre aspect, à la fois choquant, mais surtout révélateur, de ce prétendu plan, c'est que rien n'est prévu pour financer les mesures qu'il impliquerait. Il y a donc gros à parier que les employés précaires titularisés permettront aux autorités de limiter le recrutement de nouveaux fonctionnaires. Car il ne s'agira pas, en fait, de créations de postes.

Pourtant les conflits récents, tant à La Poste que dans les hôpitaux, dans l'enseignement, ont tous porté sur l'insuffisance dramatique des effectifs, une insuffisance qui ne peut que s'aggraver. Car d'ici une dizaine d'années, la moitié des fonctionnaires partira à la retraite. 40 % du personnel enseignant, pour les mêmes raisons, devront être renouvelés dans les neuf prochaines années. Autre exemple, dans la Santé cette fois, dans un des plus grands hôpitaux d'Europe, la Salpetrière à Paris, la moitié de l'effectif sera à la retraite d'ici 4 ou 5 ans.

Les déclarations d'intention du ministre risquent donc de se limiter à un effet d'annonce. L'Etat, comme n'importe quel autre patron, veut disposer de personnel flexible, flexible dans son utilisation, variable dans ses effectifs. Cette main-d'oeuvre lui permet de faire des économies, Michel Sapin l'a admis en déclarant que " les CES ne coûtent pas cher à l'Etat car on crée des emplois sans créer des fonctionnaires ". Ce sont là des propos qui ont le mérite d'être clairs et qui reflètent le peu d'empressement dont fait preuve le gouvernement pour répondre aux besoins de l'emploi, mais aussi, et les deux choses sont liées, aux nécessités du service public, considérés non plus d'un point de vue comptable, mais du point de vue - le seul qui devrait compter - des besoins de la population.

En fin de compte cet accord risque de n'être qu'un rideau de fumée, un hochet pour les syndicats signataires. Mais il ne mettra pas fin à la précarité dans la Fonction et les services publics. En réduira-t-il l'importance ? On peut en douter, si l'on se fie au passé, et aux engagements - il vaudrait mieux dire aux non-engagements - de Sapin.

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